Les rues de Charlottesville, en Virginie, ont été le théâtre de violents affrontements, le 12 août dernier, lors d’une manifestation de divers groupes fascistes, allant de la droite « alternative » au Ku Klux Klan, qui protestaient contre la décision de la municipalité de déplacer une statue du général esclavagiste Robert E. Lee.
Agressions fascistes
Cette manifestation a provoqué, en réponse, la mobilisation de nombreux militants antiracistes et antifascistes, qui ont été victimes d’agressions répétées de la part des fascistes, à coup de battes et de bombes lacrymogènes – sous l’œil impassible de la police. Les fascistes étaient aussi accompagnés de miliciens en tenue de combat et armés de fusils d’assaut, qui ont pu prendre position dans les rues de la ville pour « sécuriser » leur manifestation – sans réaction des autorités.
L’horreur fut à son comble lorsqu’un fasciste a foncé au volant de sa voiture dans un rassemblement de contre-manifestants, tuant une militante et blessant grièvement dix-neuf personnes. Cette attaque n’est que la dernière de toute une série de meurtres racistes ou fascistes. En mars, par exemple, deux travailleurs d’origine indienne ont été tués au Kansas. Plus récemment, en mai, deux personnes ont été tuées par un raciste parce qu’elles avaient défendu une femme voilée dans les transports en commun de Portland. Cet incident n’est pas isolé ; de nombreux cas ont été rapportés de passants agressés parce qu’ils intervenaient pour défendre des victimes d’attaques racistes.
Rapport de forces
La multiplication de ces attaques racistes reflète l’audace croissante des couches les plus arriérées de la société, suite à l’élection de Trump. Néanmoins, alors que l’extrême droite voulait faire de cette mobilisation une démonstration de force, elle a été largement dépassée, en nombre, par les contre-manifestants sur place, sans compter les nombreuses manifestations de protestation qui se sont déroulées dans tout le pays. Cela souligne l’isolement relatif des groupes fascistes, qui essaient de compenser leur faiblesse numérique par un activisme effréné, sans réussir à rallier autour d’eux un mouvement de masse. A l’inverse, ces actions violentes suscitent des mobilisations anti-fascistes et anti-racistes toujours plus grandes et déterminées.
C’est là une des leçons les plus importantes de ces journées d’août. Nombre de commentateurs bourgeois ou réformistes parlent d’un « tournant à droite » et cherchent une explication à leurs propres faiblesses dans la prétendue « ignorance » des pauvres et des travailleurs. En réalité, la majorité des travailleurs sont radicalement opposés au racisme et aux différentes formes d’oppressions et inégalités, alors que nombre d’organisations réformistes ont adopté une position passive face aux fascistes, avant de les condamner en parole après coup. La section de Virginie de l’Association américaine des droits civiques (l’équivalent américain de la Ligue des Droits de l’Homme) a même pris la défense des fascistes de Charlottesville face à ceux qui voulaient les empêcher « d’exercer leur droit de manifester » !
Ces événements soulignent la polarisation croissante de la société américaine. Confrontées à ces explosions de racisme et aux réponses pitoyables ou complaisantes des organisations réformistes et des institutions bourgeoises, des millions de personnes sont de plus en plus ouvertes à des solutions révolutionnaires à ces problèmes inextricablement liés au capitalisme.
Racisme et capitalisme
Comme l’explique le marxisme, pour que des idées représentent une force dans la société, elles doivent correspondre aux intérêts matériels d’une couche de cette société. De ce point de vue, le racisme ne correspond pas aux intérêts des travailleurs ; par contre, il est encouragé par la classe dirigeante. Celle-ci contrôle les institutions et les médias qui forgent la conscience des masses en temps normal – et les utilise pour diviser la classe ouvrière. Cet effort conscient est renforcé par le fait que le capitalisme est incapable de satisfaire les besoins vitaux de l’ensemble de la population, ce qui pousse des travailleurs à s’affronter pour le peu qui est disponible. Telle est la base matérielle des idées racistes ou nationalistes qui existent chez un certain nombre de travailleurs. C’est pour cela qu’on ne peut pas lutter efficacement contre le racisme – ou toute forme d’oppression – sans lutter en même temps contre le capitalisme.
Une des taches du mouvement révolutionnaire est de gagner les travailleurs à la perspective d’une lutte commune contre leurs exploiteurs, tout en organisant une lutte de masse contre ceux qui ne peuvent pas être gagnés à ces idées révolutionnaires. Pour cela, les travailleurs ont besoin d’une organisation de masse, capable de structurer tous les exemples récents de courage individuel pour les opposer aux organisations des fascistes, et capable aussi de leur donner une perspective politique claire. Au final, ce n’est qu’en combattant le système qui encourage et diffuse le racisme et le fascisme que l’on pourra mettre fin aux meurtres qu’ils provoquent.