En temps normal, la monarchie est le dernier des soucis des travailleurs canadiens et québécois. Mais à l’occasion, un nouveau scandale nous rappelle que cette institution archaïque, inutile et anti-démocratique continue de se trouver au cœur du système politique canadien. Il va sans dire que les marxistes sont les plus fervents partisans de l’abolition de la monarchie et du Sénat. Mais comment y arriver?
Des événements récents ont soulevé la question de la monarchie. Il y a eu le décès du prince Philip, connu pour ses nombreuses déclarations racistes. Il y a eu les révélations de Harry et Meghan selon lesquelles le racisme de la famille royale britannique visait même leur propre fils. Avant cela, la gouverneure générale Julie Payette a été forcée de démissionner après qu’elle ait été dénoncée pour ses comportements violents envers ses employés. Au Québec, l’ancienne lieutenante-gouverneure Lise Thibault a fini en prison en 2016 pour avoir détourné des centaines de milliers de dollars de fonds publics. Son prédécesseur, Jean-Louis Roux, avait démissionné suite à la découverte de son passé fasciste. Pas étonnant alors que la popularité de la Couronne soit au plus bas.
Et chaque nouveau scandale touchant la monarchie au Canada est l’occasion de se rappeler qu’aucun autre groupe de chômeurs ne reçoit des prestations aussi généreuses. L’État canadien dépense 67,1 millions de dollars sur la gouverneure générale chaque année, alors que les lieutenant-gouverneurs ont droit à un généreux « salaire » supérieur à 100 000 dollars par année. Un autre groupe de tourneurs de pouces hérités du Moyen-Âge, les sénateurs, a coûté 114 millions de dollars au fédéral en 2019-2020.
Les sondages révèlent clairement que la population en a assez. Selon la firme Léger, « 53% des Canadiens croient que la monarchie britannique est dépassée et n’a plus sa place au 21e siècle ». Ces sentiments sont encore plus forts au Québec, où 74% des répondants à un sondage Léger souhaitaient l’abolition de la monarchie.
Interrogé à propos de l’interview d’Harry et Meghan, le premier ministre Justin Trudeau a réagi en ne disant rien de précis, conformément à ses habitudes. « Il y a beaucoup d’institutions que nous avons dans ce pays, y compris ce grand bâtiment juste en face de nous, le Parlement, qui a été et est construit autour d’un système de colonialisme, de discrimination, de racisme systémique dans toutes nos institutions. […] Mais la réponse n’est pas de jeter soudainement toutes les institutions et de recommencer à zéro, » a-t-il dit.
Le chef du NPD fédéral, Jagmeet Singh, a quant à lui affirmé qu’il « ne voit pas l’intérêt de la monarchie dans la vie des Canadiens ». Ses propos reflètent une opinion courante dans la gauche à travers le Canada, selon laquelle la monarchie est une vieillerie inutile et dispendieuse, mais essentiellement inoffensive. Il nous faut toutefois souligner qu’il s’agit d’une erreur.
Un symbole réactionnaire
En effet, si, pour nous, il s’agit d’une institution archaïque et inutile, pour la classe dirigeante canadienne elle retient toute son importance, voire a une importance encore plus grande aujourd’hui, en cette époque de révolutions et de soulèvements de masse.
Le National Post avouait récemment de façon détournée comment la classe dirigeante canadienne s’appuie sur la Couronne : « À une époque où les universitaires et un groupe de militants de plus en plus bruyants définissent le monde en termes marxiens – bourgeoisie contre prolétariat, oppresseur contre opprimé – il peut être difficile de se rendre compte de la chance que nous avons, en tant que Canadiens, et de combien le Canada est bien servi par ses institutions et son système de gouvernement. » Ce que dit à demi-mot le Post, c’est qu’à une époque où de plus en plus de travailleurs et d’opprimés prennent conscience de leurs intérêts, la bourgeoisie canadienne a besoin plus que jamais de la dernière ligne de défense que lui apportent ses institutions comme la Couronne et le Sénat.
Les représentants de la reine au Canada semblent en temps normal ne jouer aucun autre rôle que d’assister à des cérémonies et approuver les décisions prises par les élus. Toutefois, il ne faudrait pas croire qu’ils sont inoffensifs. S’il n’interviennent presque pas dans la politique en temps normal, c’est pour mieux intervenir en situation d’urgence.
Dans son oeuvre The English Constitution, le constitutionnaliste anglais Walter Bagehot a donné l’explication la plus classique et la plus franche du rôle de la monarchie britannique. Il y explique ce que cache l’apparence de neutralité de la monarchie et de ses représentants :
« Quand un monarque peut bénir, il vaut mieux qu’il ne soit pas touché. Il doit être évident qu’il ne peut mal faire. Il ne doit pas être approché suffisamment de près pour être mesuré. Il doit être distant et solitaire. Comme les fonctions de la royauté anglaise sont pour la plupart latentes, elle remplit cette condition. Elle semble ordonner, mais elle ne paraît jamais en difficulté. Elle est souvent cachée comme un mystère, et parfois paradée comme un spectacle, mais dans aucun cas elle n’est en conflit. La nation est divisée en partis, mais la Couronne n’est d’aucun parti. Son apparente séparation des affaires est ce qui la soustrait à la fois aux inimitiés et à la profanation, ce qui préserve son mystère, ce qui lui permet de combiner l’affection des parties en conflit – d’être un symbole visible d’unité pour ceux qui sont encore si imparfaitement éduqués qu’ils ont besoin d’un symbole. » (Walter Bagehot, The English Constitution)
Comme Bagehot le souligne, l’apparence de neutralité de la Couronne permet de préserver une unité derrière elle.
Global News a récemment interviewé Robert Finch, le président national de la Ligue monarchiste du Canada, qui abondait dans le même sens : « M. Finch a souligné que la Reine et la Couronne peuvent être une « force merveilleuse » pour l’unité nationale et l’identité canadienne, c’est pourquoi des récompenses telles que l’Ordre du Canada sont décernées au nom de la Reine, par exemple. […] Un bon exemple de cela est la tournée royale, a-t-il ajouté. […] « Regardez les foules qui se déplacent pour voir la Reine ou un membre de la famille royale lorsqu’ils sont au Canada », a déclaré M. Finch. […] « Personne d’autre ne peut attirer une telle foule – diversifiée en âge, en ethnie, en politique, en langue, en milieu socio-économique, etc. C’est le rôle cérémoniel de la Couronne. » »
Grâce à cette unité, en temps normal purement symbolique, la Couronne peut servir d’arme de réserve de la classe dirigeante en cas de crise. Le révolutionnaire russe Léon Trotsky expliquait ainsi le rôle de la monarchie anglaise :
« La royauté est faible, puisque le Parlement bourgeois est le moyen de domination de la bourgeoisie, et puisque celle-ci n’a pas besoin d’armes extraparlementaires. Mais, en cas de besoin, la bourgeoisie peut tirer parti de la royauté avec le plus grand succès, comme du centre de ralliement de toutes les forces extraparlementaires, c’est-à-dire réelles, dirigées contre la classe ouvrière. La bourgeoisie anglaise comprit fort bien elle-même, en de tels cas, le danger que présente la monarchie, même la plus fictive. C’est ainsi qu’en 1837, le gouvernement britannique abolit aux Indes le titre de « Grand Mogol », en exilant son détenteur de la ville sainte de Delhi, bien que le titre fût à l’époque tout à fait vain : la bourgeoisie anglaise comprenait que le Grand Mogol eût pu, en de certaines conditions, devenir le centre de ralliement des milieux dirigeants hindous contre la domination britannique. » (Trotsky, Où va l’Angleterre)
Ainsi, l’apparence de neutralité de la Couronne sert aussi à cacher qu’elle a bel et bien un parti pris. Si la Couronne reste neutre entre les différents partis qui s’échangent le pouvoir, c’est parce que ces différents partis, malgré leurs désaccords sur tel et tel projet de loi, malgré qu’ils se font concurrence pour les postes d’élus, représentent ultimement les intérêts de la même classe sociale, la bourgeoisie. La Couronne a précisément comme rôle de s’assurer que l’activité du parlement et la démocratie demeurent dans les limites de cette compétition entre partis bourgeois. En aucun cas la démocratie constitutionnelle, anglaise comme canadienne, ne peut servir à avancer les intérêts des travailleurs, et surtout pas – l’horreur! – à adopter un programme socialiste.
Comme l’explique Alan Woods concernant le rôle de la royauté au Royaume-Uni :
« Il est nécessaire de comprendre que la monarchie n’est pas simplement un anachronisme inoffensif et sans pouvoirs. Elle est une importante arme de réserve de la réaction. La Reine dispose d’importants pouvoirs de réserve qui peuvent être mobilisés en cas de crise nationale. De tels pouvoirs seraient sans aucun doute utilisés contre un gouvernement travailliste de gauche qui tenterait de remettre en question le pouvoir et les privilèges des grandes banques et des monopoles qui possèdent et contrôlent la majeure partie de la Grande-Bretagne. Bien que la plupart des gens ne le réalisent pas, c’est le rôle principal de la monarchie et la raison pour laquelle elle a été maintenue en place par la classe dirigeante pendant si longtemps. » (Alan Woods, « Diana, the Monarchy and the Crisis in Britain »)
Ces commentaires s’appliquent aussi de façon générale aux institutions canadiennes comme le gouverneur général et les lieutenants-gouverneurs ainsi qu’au Sénat.
Un danger bien réel
C’est pour cette raison que la Couronne est investie de pouvoirs d’urgence. Walter Bagehot souligne ainsi comment le roi ou la reine pourrait être utilisé à des fins anti-démocratiques :
« Le roi, lui aussi, possède un pouvoir, en théorie destiné à un usage extrême dans une occasion critique, mais qu’il peut en droit utiliser en toute occasion. Il peut dissoudre; il peut dire à son ministre en fait, sinon en paroles, “Ce parlement vous a envoyé ici, mais je verrai si je ne peux pas obtenir d’un autre parlement qu’il envoie quelqu’un d’autre ici”. » (Walter Bagehot, The English Constitution)
Comme le souligne le National Post, la monarchie a la même fonction ici : « Le Canada a une constitution qui est « semblable en principe à celle du Royaume-Uni ». Nous en avons hérité le système de démocratie parlementaire de Westminster et la tradition d’un souverain qui s’en remet toujours aux souhaits des représentants élus du peuple, mais qui est néanmoins là comme ultime défense contre les abus odieux du pouvoir gouvernemental. »
Ce pouvoir a déjà été utilisé auparavant, lors de la fameuse affaire King-Byng de 1926. À cette occasion, le gouverneur général Byng a laissé tomber son apparence de neutralité et refusé d’accéder à la demande du premier ministre Mackenzie King de dissoudre le Parlement et de déclencher une élection, choisissant plutôt de donner le pouvoir au Parti conservateur. Le gouverneur général possède toujours les mêmes pouvoirs aujourd’hui.
Il n’y a aucun doute que les représentants de la Couronne et les autres institutions féodales seraient sortis des boules à mites pour imposer la volonté de la classe dirigeante si cette dernière jugeait cela absolument nécessaire.
Mais contrairement au pouvoir essentiellement « fictif », symbolique, de la royauté au Royaume-Uni, ancré dans une constitution non écrite, les institutions monarchiques au Canada ont des assises solides dans une constitution écrite et pratiquement intouchable.
La constitution canadienne accorde des pouvoirs importants à la Couronne. Elle prévoit par exemple que les lois adoptées par le Parlement canadien et les assemblées provinciales doivent être approuvées par la Couronne. L’article 9 de la Loi constitutionnelle de 1867 prévoit que « À la Reine continueront d’être et sont par la présente attribués le gouvernement et le pouvoir exécutifs du Canada ». L’article 15 accorde le « commandement en chef des milices de terre et de mer et de toutes les forces militaires et navales en Canada ».
Malgré qu’en temps normal on tend à les oublier et à s’imaginer ces pouvoirs comme purement symboliques, ils demeurent inscrits dans la loi, en potentiel. Aussi récemment que 2013, une loi canadienne, la Loi de 2013 sur la succession au trône, rappelait que « la Loi constitutionnelle de 1867 déclare que Sa Majesté la Reine est investie du pouvoir exécutif pour le Canada ».
Le lieutenant-gouverneur du Québec, lors de sa nomination en 2015, a rappelé en entrevue que son pouvoir n’est « pas seulement symbolique » et qu’il serait prêt à « refuser de signer une loi » s’il la jugeait antidémocratique.
Dans la décision McAteer, la Cour supérieure de l’Ontario réaffirmait les pouvoirs de la reine en 2013 :
« Néanmoins, la Reine conserve l’autorité sur « la prérogative de clémence, l’octroi d’honneurs, la dissolution du Parlement et la nomination des ministres » et d’autres questions proportionnelles à sa stature de souveraine nationale, […] même si la plupart des pouvoirs de prérogative sont aujourd’hui exercés sur le conseil du premier ministre et soumis à la Charte. »
Le Sénat aussi est une autre relique féodale qui joue un rôle de garde-fou pour la classe dirigeante. Comme les lois doivent passer par les deux chambres – la Chambre des communes et le Sénat – le Sénat a le pouvoir de les bloquer.
Le Sénat a déjà été utilisé à des fins anti-démocratiques par le passé, notamment pour empêcher l’abrogation de l’article 98 du Code criminel. Cet article avait été adopté en 1919 par le gouvernement conservateur de Borden en réaction à la grève générale de Winnipeg. Il rendait illégale toute organisation qui préconisait le recours à la force pour changer le gouvernement. Sa formulation, délibérément vague et de grande portée, visait en pratique à terroriser et à criminaliser les communistes et les syndicalistes. Il avait servi à emprisonner huit membres dirigeants du Parti communiste du Canada pour le simple « crime » d’appartenir à une organisation communiste. Le Sénat non élu a bloqué son abrogation au moins sept fois, empêchant ainsi l’application d’une décision prise à majorité par la Chambre des communes.
La Cour suprême reconnaissait assez candidement ce rôle de protection du statu quo dans le Renvoi relatif à la réforme du Sénat :
« Les auteurs de la Loi constitutionnelle de 1867 ont cherché à adapter le modèle de gouvernement britannique à un nouveau pays, pour doter celui‑ci d’une “constitution reposant sur les mêmes principes que celle du Royaume‑Uni” […] Ils souhaitaient ainsi préserver la structure parlementaire britannique constituée d’une chambre législative basse où siègent des représentants élus, d’une chambre législative haute formée de membres de l’élite nommés par la Couronne, et de la Couronne en tant que chef de l’État. Ainsi, la chambre haute — appelée Sénat par les auteurs de la Constitution — a été créée sur le modèle de la Chambre des lords britannique, mais adaptée au contexte canadien. Comme au Royaume‑Uni, elle a été conçue pour permettre de donner un “second regard attentif” (“sober second thought”) aux mesures législatives adoptées par les représentants du peuple à la Chambre des communes. » (Renvoi relatif à la réforme du Sénat, 2014 CSC 32, paras 14-15) [mes italiques]
Un des mythes colportés par les partisans des institutions fédérales canadiennes et du Sénat en particulier veut que celui-ci soit le champion de « la protection des minorités », comme le dit la Cour suprême. En réalité, le « père de la confédération », John A. MacDonald, a dit explicitement de quelle minorité il s’agit. « Nous devons protéger les intérêts des minorités, et les riches sont toujours moins nombreux que les pauvres », a-t-il affirmé au cours des débats sur la création du Sénat.
Bref, le Sénat est formé d’une élite non élue et sert de filtre aux lois adoptées par la Chambre des Communes. Les sénateurs sont nommés par le gouverneur général sur recommandation du premier ministre, et gardent leur poste jusqu’à l’âge de 75 ans. En pratique, les postes de sénateurs, qui donnent droit à un beau salaire d’au moins 150 600 dollars, ont souvent servi de cadeaux aux amis du parti au pouvoir. Bien que Justin Trudeau ait adopté un processus soi-disant indépendant de sélection des candidatures au Sénat en réponse au scandale des dépenses, cela ne change pas leur caractère non élu, et le Sénat demeure composé de personnes en qui la classe dirigeante a confiance pour maintenir le statu quo.
On aurait tort de s’imaginer que les pouvoirs de ces institutions ne sont que théoriques. L’Australie, un autre pays où la Couronne britannique demeure formellement la chef d’État, nous donne un bon exemple du genre de manœuvre anti-démocratique que le gouverneur général pourrait utiliser contre un gouvernement socialiste – ou même trop réformiste à son goût. Lors de la crise constitutionnelle de 1975, le gouverneur général a manigancé pour démettre le premier ministre travailliste Whitlam et placer le Parti libéral minoritaire au pouvoir. L’Australian Labor Party, élu en 1972, a tenté en vain d’appliquer des politiques réformistes progressistes dans un cadre parlementaire et capitaliste. Après trois ans, la classe dirigeante a fini par perdre patience et lui a tout simplement enlevé le pouvoir des mains grâce à son outil de dernier recours, la Couronne.
Aussi récemment qu’en 2008, la gouverneure générale Michaëlle Jean, la représentante de la Couronne britannique au Canada, s’est servi de ses pouvoirs d’une façon complètement anti-démocratique. Elle a prorogé le Parlement, et ainsi empêché la tenue d’un vote de non-confiance qui aurait fait tomber le gouvernement conservateur de Stephen Harper, et ce, malgré que les partis d’opposition formaient une majorité et s’étaient entendus pour former un gouvernement de coalition.
Ainsi, plus qu’en raison des millions qu’elles coûtent, c’est parce qu’il s’agit d’armes réactionnaires et anti-démocratiques entre les mains de la classe dirigeante que nous appelons à l’abolition de la monarchie et du Sénat.
Toutefois, force est d’admettre qu’au Canada, se débarrasser de la monarchie n’est pas une tâche facile. La Couronne a des assises juridiques beaucoup plus solides ici qu’au Royaume-Uni. Ce dernier possède une constitution non écrite, formée par la coutume et la jurisprudence, mais non codifiée dans une loi. Cela signifie que théoriquement, le Parlement britannique pourrait abolir la monarchie par un vote à majorité simple.
Le Canada n’a pas ce luxe. La monarchie et le Sénat sont ancrés profondément dans la constitution canadienne, qui les rend presque indélogeables par les mécanismes de la « démocratie » bourgeoise.
La constitution canadienne
La constitution de 1867, à l’origine une loi britannique, a été formellement adoptée comme loi canadienne – sans le consentement du Québec – lors du rapatriement de la constitution en 1982 par le gouvernement de Trudeau père. Les procédures de modifications constitutionnelles adoptées en 1982 sont très lourdes. Selon l’expert en droit constitutionnel Emmett Macfarlane, le Canada « a sans doute la constitution la plus difficile à amender au monde ».
L’abolition du Sénat et la modification de la charge de reine, celle de gouverneur général et celle de lieutenant‑gouverneur (donc aussi leur abolition) exigent la formule de modification unanime décrite à l’article 41 de la Loi constitutionnelle de 1982, soit l’appui du Sénat, de la Chambre des communes et de l’Assemblée législative de chaque province. La Cour suprême l’a confirmé en 2014 dans le Renvoi relatif à la réforme du Sénat, 2014 CSC 32, après que le gouvernement de Stephen Harper lui ait soumis une série de questions afin de plaire aux vieux conservateurs du Parti réformiste qui souhaitaient une réforme du Sénat.
Un tel consentement unanime représente un degré d’accord quasiment impossible à atteindre. Chaque province possédant essentiellement un véto, elles peuvent toutes s’en servir pour obtenir des concessions sur toutes sortes d’autres sujets. Même le Sénat non élu a un droit de veto sur sa propre abolition!
Les modifications constitutionnelles représentent donc un véritable nid de guêpes pour les capitalistes canadiens. Les échecs de l’accord du Lac Meech en 1987 puis de l’accord de Charlottetown en 1992 ont poussé le Québec à tenter de se séparer en 1995. On comprend donc que la classe dirigeante canadienne est peu intéressée à tenter une nouvelle fois l’expérience, cette fois pour abolir la monarchie – d’autant plus que comme nous l’avons vu, elle est bien contente d’avoir une monarchie. Elle résistera activement à toute tentative d’ouvrir ce qu’elle considère comme une boîte de Pandore pour une chose aussi triviale que la « démocratie ».
Le National Post soutenait : « Se débarrasser de la monarchie supposerait de vastes réformes constitutionnelles qui exigeraient des efforts considérables et des dépenses énormes, avec très peu d’avantages. Cela nécessiterait également un accord historique entre les régions et les nationalités de plus en plus disparates du Canada qui pourrait très facilement déchirer le pays. »
Le National Post a récemment publié un article en défense de la monarchie intitulé « Canada’s anti-monarchists want a revolution and they should admit it » (« Les anti-monarchistes canadiens veulent une révolution et ils devraient l’admettre »). Le Post touche ici au cœur du problème. La classe dirigeante canadienne a placé la monarchie au cœur de l’ordre politique, juridique et constitutionnel canadien, afin de s’assurer que la démocratie ne lui échappe pas. Elle a également fait en sorte que ses propres institutions démocratiques soient pratiquement incapables de se débarrasser de la Couronne. Par conséquent, la majorité croissante de Canadiens qui s’opposent à la monarchie n’a aucun moyen de s’exprimer. La réalité est que les monarchistes du Canada s’opposent au règne de la majorité, mais ils ne veulent pas l’admettre.
Ainsi, les capitalistes canadiens se sont assurés que la monarchie ne puisse être abolie par des moyens parlementaires-constitutionnels. La volonté de la majorité n’a aucun moyen d’être exprimée par les institutions mises en place par la classe dirigeante et sa constitution. Cela ne laisse pas d’autre choix au peuple que d’affirmer sa volonté par des méthodes de démocratie directe révolutionnaire.
Le Québec et la monarchie
Si la monarchie a perdu des plumes au Canada anglais avec les derniers scandales, elle est absolument détestée au Québec. Peu de Québécois acceptent avec plaisir de devoir payer pour une institution représentative de notre oppression séculaire.
Le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, a affirmé avec justesse lors du dépôt en février d’une motion à l’Assemblée nationale demandant l’abolition de la monarchie : « On veut se débarrasser d’une institution d’origine coloniale, qui nous coûte une fortune et qui nous rappelle sur une base régulière qu’au Québec on n’est pas dans une démocratie libre, on est toujours dans un régime constitutionnel qui est directement issu du pouvoir colonial britannique et par la bande canadien. » Nous sommes bien d’accord avec lui.
Mais certains nationalistes ne sont pas conséquents dans leur opposition à la monarchie. Par exemple, la Coalition avenir Québec, majoritaire à l’Assemblée nationale, a refusé d’appuyer la motion du PQ. Le porte-parole de la ministre responsable des Institutions démocratiques a donné une excuse bien maigre : « Les Québécois ont bien d’autres priorités à l’heure actuelle et ne souhaitent pas voir leur gouvernement s’engager dans ce processus, surtout en crise sanitaire. » Le masque est finalement tombé lorsque Legault a décidé de souligner le décès du prince Philip en mettant le drapeau du Québec en berne sur le Parlement le jour des funérailles. On voit là quelles sont vraiment ses priorités.
En réalité, la CAQ, qui se prétend la championne des Québécois, n’a pas plus l’intention de toucher à la monarchie que le Parti libéral du Canada. Elle comprend parfaitement comment la Couronne renforce le maintien de la domination capitaliste. Plutôt que de lancer une bataille contre les institutions anti-démocratiques fédérales qui oppriment vraiment les Québécois, elle préfère se battre contre une menace islamiste imaginaire.
Quant aux indépendantistes, la monarchie représente pour eux un autre argument justifiant l’indépendance. Pour eux, la solution à l’abolition de la monarchie est évidente. Gabriel Nadeau-Dubois, leader de Québec solidaire, a assez bien résumé le point de vue de beaucoup d’indépendantistes, au PQ comme chez QS. Lorsqu’on lui a demandé son opinion sur l’abolition de la monarchie, il a répliqué : « Il faut certainement le faire. Comment on procède? C’est très simple : on fait l’indépendance du Québec. »
En pratique, cette solution n’est pas vraiment une solution. Paul St-Pierre Plamondon accuse la CAQ de « remettre aux calendes grecques » l’abolition de la monarchie. Toutefois, si la solution est l’indépendance du Québec, il faut souligner que le PQ, qui a lui-même tendance à remettre la tenue d’un référendum « aux calendes grecques », ne fait pas vraiment meilleure figure.
De plus, il faut souligner qu’un référendum, surtout mené par le PQ, aurait peu de chances de mener vraiment à un renversement profond de l’ordre constitutionnel canadien. Les nationalistes bourgeois et petits-bourgeois du PQ, s’ils se présentent comme les plus ardents indépendantistes et anti-monarchistes, se dégonfleraient rapidement en cas de victoire référendaire.
Comme la journaliste Chantal Hébert l’a révélé dans ses entrevues avec les acteurs du référendum de 1995, deux des trois meneurs du camp du Oui, Mario Dumont et Lucien Bouchard, n’étaient pas prêts à faire la sécession en cas de majorité simple. Bouchard espérait se servir d’un Oui, non pour faire l’indépendance, mais pour négocier des meilleures conditions auprès d’Ottawa. On peut être certains que l’abolition aurait été bien en bas dans leur liste de priorités en cas de telles négociations. Cette attitude est typique des nationalistes bourgeois, pour qui l’indépendance n’est souvent qu’une menace à utiliser auprès des bourgeois canadiens pour mieux asseoir leurs propres intérêts (économiques) sur le Québec.
De plus, il y a peu de chance que la classe dirigeante canadienne laisse une chose aussi triviale que la volonté démocratique d’une majorité de Québécois démanteler la fédération canadienne. La séparation d’une province représentant 20% du PIB du pays serait inacceptable pour la classe dirigeante canadienne. En fait, le premier ministre du Canada à l’époque du référendum de 1995, Jean Chrétien, a admis plus tard qu’il planifiait de refuser de reconnaître un Oui, le cas échéant.
L’État canadien utiliserait tous les moyens légaux à sa disposition pour bloquer une tentative de sécession. Notamment, après le référendum de 1995, la classe dirigeante canadienne s’est dotée d’une arme anti-démocratique, la Loi sur la clarté référendaire, pour mettre des bâtons dans les roues à un référendum. Celle-ci impose notamment que la Chambre des communes approuve la question référendaire et décide si une majorité suffisante est obtenue. Elle permet essentiellement à la Chambre des communes de refuser de reconnaître la volonté démocratique d’une majorité de Québécois.
En cas de victoire référendaire, les nationalistes québécois seraient donc confrontés aux mêmes genres d’obstacles juridiques et constitutionnels que les opposants canadiens à la monarchie. L’ordre constitutionnel canadien ne saurait être bouleversé par la volonté démocratique d’un peuple. C’est ce qu’expliquait la Cour suprême dans le Renvoi relatif à la sécession du Québec, [1998] 2 RCS 217 :
« Le Québec ne pourrait, malgré un résultat référendaire clair, invoquer un droit à l’autodétermination pour dicter aux autres parties de la fédération les conditions d’un projet de sécession. Le vote démocratique, quelle que soit l’ampleur de la majorité, n’aurait en soi aucun effet juridique et ne pourrait écarter les principes du fédéralisme et de la primauté du droit, les droits de la personne et des minorités, non plus que le fonctionnement de la démocratie dans les autres provinces ou dans l’ensemble du Canada. Les droits démocratiques fondés sur la Constitution ne peuvent être dissociés des obligations constitutionnelles. »
Bref, les nationalistes québécois, tout comme les anti-monarchistes du Canada anglais, devraient composer avec le fait que la volonté démocratique de la majorité ne peut être appliquée dans le cadre légal actuel. Les indépendantistes qui pensent qu’il serait nécessairement plus facile de se débarrasser de la monarchie en faisant l’indépendance du Québec que de se débarrasser de la Couronne dans l’ensemble du Canada se gourent royalement. Dans les deux cas, la classe dirigeante canadienne nous empêche de passer par des moyens démocratiques dans le cadre constitutionnel actuel, et nous oblige donc à recourir à des moyens révolutionnaires.
Mais alors comment abolir la monarchie ? Le soutien à l’abolition de la monarchie atteignant des sommets dans tout le pays, il serait en fait contre-productif de limiter le mouvement à un mouvement purement québécois pour l’indépendance. Nous nous battons au coude à coude avec les nationalistes québécois contre les institutions réactionnaires comme la monarchie britannique et l’État canadien, mais nous nous battons pour unifier les travailleurs et les opprimés de tout l’État canadien pour y parvenir. Une telle unité de classe est la voie que nous devons suivre si nous voulons vraiment abolir la monarchie.
Nous nous battrons côte à côte avec les nationalistes honnêtes souhaitant vraiment abolir la monarchie, mais nous devons dire que l’indépendance ne pourrait être une façon d’abolir la monarchie que si elle passait par des moyens révolutionnaires. Or, les nationalistes bourgeois québécois ne passeront jamais par de telles méthodes. Ils craignent plus leur propre classe ouvrière que la bourgeoisie canadienne-anglaise. Ils ne veulent un changement constitutionnel que dans la mesure où cela ne met pas en danger leur position socio-économique privilégiée. On ne peut pas compter sur les partis bourgeois nationalistes comme la CAQ et le PQ pour abolir la monarchie.
Les Autochtones et la monarchie
Finalement, il reste un élément de plus à prendre en compte dans l’équation de l’abolition de la monarchie. Certains ont soutenu que l’abolition de la monarchie au Canada pourrait susciter des craintes chez les Autochtones. La Couronne britannique, à travers la Proclamation royale de 1763, a établi que les titres sur les terres appartenaient aux Premières Nations à moins d’être éteints formellement par traité. Différents traités ont par la suite été conclus entre la Couronne et les Premières Nations.
Pour cette raison, les chefs des Premières Nations vont souvent rencontrer les membres de la famille royale pour leur rappeler les promesses de leurs ancêtres lors des visites royales. Après la démission de Julie Payette comme gouverneure générale, la Confédération du Traité six a envoyé une lettre directement à la reine d’Angleterre pour lui faire connaître ses inquiétudes.
Cela pousse Nathan Tidrige, un auteur ayant écrit sur les relations entre les Autochtones et la Couronne, à se porter à la défense de la monarchie. Dans un article intitulé « Abolishing monarchy in Canada will complete colonization of Indigenous people » (« Abolir la monarchie au Canada complèterait la colonisation des Autochtones »), il s’oppose à son abolition sous prétexte de défendre les droits des Autochtones.
Ce faisant, il embellit le rôle historique de la Couronne d’Angleterre. Selon lui, la Couronne a été « cooptée dans les efforts pour coloniser ce continent par la force […] Toutefois, cela n’était pas la vision d’origine pour ces terres ». Ainsi, ce serait les colons canadiens qui auraient opprimé les Autochtones, contre la volonté de l’innocente royauté britannique, amie des premiers peuples d’Amérique! Il faut le faire. À en croire la vision de M. Tidrige, le destin de la famille royale est vraiment à pleurer. Pauvre elle, associée malgré elle au pillage, à l’asservissement et au massacre d’autant de peuples, de la Chine à l’Irlande en passant par l’Afrique du Sud, l’Inde et les Amériques! En réalité, comme le dit la journaliste anichinabée Tanya Talaga, « la monarchie a passé des siècles à fermer les yeux sur les crimes du colonialisme ».
Il ne faudrait pas croire non plus que la Couronne britannique avait reconnu les titres des Autochtones sur leurs terres par altruisme et amitié avec ceux-ci. Comme nous l’expliquons dans notre document La lutte des Autochtones et la lutte pour le socialisme :
« Les traités ont joué un rôle important dans la préparation des terres et des peuples autochtones au développement capitaliste. Les traités se fondaient sur deux sources juridiques : l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, qui donnait à la Couronne le pouvoir de gérer les peuples autochtones, et la Proclamation royale de 1763 qui affirmait que tout titre de propriété légal appartenait aux Autochtones à moins d’être éteint par un traité. Cette proclamation constitue la base juridique utilisée aujourd’hui par les Autochtones pour leurs revendications territoriales. Cependant, comme nous l’avons déjà expliqué, la Proclamation royale n’a jamais eu pour objectif de défendre les droits territoriaux des Autochtones, mais visait plutôt à empêcher les colonies d’acquérir des terres directement, protégeant ainsi le monopole de la Couronne britannique sur les terres. Les Britanniques n’ont pas hésité à manipuler et à tromper les peuples autochtones lors de la négociation des traités pour les dépouiller de vastes étendues de leur terre et les pousser vers des terres non arables et de qualité inférieure. »
Ainsi, cette tentative de distinguer la gentille Couronne britannique de ses méchants colons canadiens ayant agi sans son consentement ne tient pas la route. Cela étant dit, s’il ne fait pas de doute que la Couronne britannique a du sang sur les mains, il demeure qu’il faut reconnaître les craintes de certains Autochtones. Les traités conclus avec la Couronne britannique représentent encore aujourd’hui pour beaucoup de Premières Nations un dernier rempart pour se protéger des tentatives d’empiètement sur leur territoire par les gouvernements et les capitalistes canadiens. Il existe une crainte que la fin de la monarchie pourrait éteindre ces traités.
Or, d’autres ont souligné que, d’un point de vue juridique, l’abolition de la monarchie ne devrait pas brimer les droits issus des traités. Selon ce raisonnement, les traités devraient être vus comme étant conclus entre nations souveraines, donc appartenir au droit international. Selon le droit international, « lorsqu’une forme de gouvernement en remplace une autre, le nouveau gouvernement acquiert les droits et obligations découlant des traités de son prédécesseur. Ainsi, le passage d’une monarchie à une république n’affecte pas les traités conclus par le Canada avec les peuples autochtones ».
Quoi qu’il en soit sur le plan juridique, les gouvernements qui se succèdent depuis la colonisation n’ont pas fait grand cas de la règle de droit. En ce sens, on peut comprendre la crainte de certains Autochtones. En cas d’abolition de la monarchie par un gouvernement bourgeois, il y a fort à parier que celui-ci se servirait de cette occasion pour tenter de se libérer de ses obligations issues des traités.
Toutefois, plusieurs remarques s’imposent ici. D’abord, comme nous l’avons déjà expliqué, il est fort peu probable qu’un gouvernement bourgeois tente d’abolir la monarchie. Elle joue un rôle important pour la classe dirigeante, et les procédures constitutionnelles très lourdes risqueraient de déchirer le pays. En fait, les chroniqueurs de droite ont été plusieurs à utiliser de façon incroyablement hypocrite l’argument des droits des Autochtones pour défendre le maintien de la monarchie!
Mais surtout, cela souligne de nouveau le fait que les droits des Autochtones ne seront jamais protégés sous le statu quo capitaliste. L’État capitaliste fédéral et toutes ses institutions anti-démocratiques et coloniales constituent des piliers de l’oppression historique des Autochtones, ainsi que des Québécois et des travailleurs canadiens en général. Il est franchement absurde de se porter à la défense d’une institution centrale du statu quo capitaliste au nom des Autochtones.
Au contraire, le besoin de protéger les droits issus des traités donne du poids à l’argument de la nécessité de passer par une révolution pour abolir la monarchie. L’oppression des Autochtones constitue une nécessité pour la classe capitaliste canadienne. Les Premières Nations défendant leur territoire représentent un obstacle au développement capitaliste, comme on l’a vu constamment à travers l’histoire. Par exemple, les défenseurs du territoire haudenosaunee de 1492 Landback Lane, sur le territoire des Six Nations en Ontario, bloquent actuellement un développement immobilier fait sans leur consentement.
Les promoteurs immobiliers et les pétrolières qui veulent écarter les Premières Nations de leurs terres sont aussi les ennemis de la classe ouvrière canadienne et québécoise. Une révolution socialiste qui retirerait le pouvoir à ces parasites capitalistes serait avantageuse pour les classes laborieuses et opprimés de tous les peuples du pays actuellement appelé Canada. Par conséquent, une solidarité est possible entre travailleurs autochtones, québécois et canadiens pour l’abolition de la monarchie, à condition de lier l’abolition de la monarchie à un programme révolutionnaire capable de déloger leurs ennemis communs.
Abolissons la monarchie!
À une époque de crise économique, d’inégalités croissantes et de pandémie interminable, beaucoup de gens en viennent à la conclusion que le statu quo n’est plus tenable. Pendant que les travailleurs essentiels risquent leur vie pour des miettes, les ultra-riches continuent de s’enrichir à un rythme grandissant en sécurité dans leurs villas. Pourtant, le Canada garde sa stabilité politique légendaire. Mais sous la surface, la colère gronde.
Sous l’effet de la crise, des mouvements insurrectionnels ont éclaté dans un pays après l’autre depuis quelques années. Un jour où l’autre, les travailleurs canadiens appauvris, pressurisés et épuisés se mobiliseront pour demander de mettre fin aux profondes inégalités. Ils demanderont des changements profonds à l’ordre politique et économique. Or, le règne des capitalistes repose sur l’exploitation des travailleurs, donc sur cette inégalité. Ils ne peuvent permettre que les travailleurs aient vraiment leur mot à dire.
À ce moment, le Sénat, le gouverneur général, les lieutenants-gouverneurs et la reine d’Angleterre serviront de dernière ligne de défense du règne vacillant des capitalistes. Pour que les travailleurs s’émancipent afin de parvenir à une véritable démocratie économique et politique, nous devrons abolir la monarchie.
Mais la classe dirigeante canadienne a spécifiquement écrit sa constitution pour qu’il n’y ait aucun moyen institutionnel d’abolir la monarchie. Pour les capitalistes canadiens, la volonté démocratique du peuple de changer le système politique est sans importance. Par conséquent, nous ne pouvons qu’arriver à la conclusion que le système ne peut être réformé et que la monarchie ne peut être éliminée sans révolution.
La lutte pour l’abolition de la monarchie et du Sénat devrait donc passer par un mouvement révolutionnaire. Pour qu’un tel mouvement réussisse, il devrait unir les travailleurs des différents peuples du Canada. Seul un programme socialiste pourrait réaliser cette unité.
Une république socialiste sera la première instance d’une véritable démocratie. En plaçant les grands leviers de l’économie sous le contrôle démocratique des travailleurs, nous aurons non seulement une démocratie politique, mais aussi une démocratie économique. Plutôt que d’élire une fois aux quatre ans les corrompus confortables qui représenteront nos exploiteurs, tous les postes de dirigeants seront révocables en tout temps et payés pas plus que le salaire du travailleur moyen. Nous mettrons ainsi fin à la dictature de Bay Street, et jetterons aux poubelles de l’histoire les reliques féodales de la monarchie héréditaire.
Si vous souhaitez abolir la monarchie, et établir une véritable démocratie, joignez-vous à nous dans cette lutte.
À bas l’État fédéral oppresseur!
À bas les institutions et reliques monarchiques et féodales! Abolissons les postes de gouverneur général, de lieutenant-gouverneur, et le Sénat!
Déchirons la constitution canadienne anti-démocratique!
Pour une république socialiste du Canada, en union libre avec une république socialiste du Québec!