Cet été, les médias ont focalisé l’attention sur un sujet complètement disproportionné au regard de l’actualité nationale comme internationale : la décision de plusieurs maires Les Républicains mais aussi PS (soutenus par Valls et d’autres ministres) d’interdire le port d’un vêtement appelé burkini sur les plages. Cette décision intervient dans un climat général de propagande raciste à l’encontre des « populations issues de l’immigration » et des musulmans en particulier, surtout depuis la vague d’attentats qui a touché la France. Ces derniers sont soupçonnés de faire la promotion d’un islam violent contraire aux « principes républicains », quand ils ne sont pas tout bonnement associés aux actions terroristes revendiquées par Daesh. La classe politique et les médias amalgament ainsi pêle-mêle l’islam, l’intégrisme, l’immigration et le terrorisme, oubliant délibérément que les terroristes frappent sans distinction de couleur de peau ou de religion.
Les femmes portant le burkini (mais en filigrane toutes celles portant un voile ou tout autre vêtement s’y apparentant) sont accusées d’être à l’origine de troubles à l’ordre public, de menacer la sécurité publique et d’être les porte-étendard d’une idéologie politique destructrice associée au terrorisme islamique. Dans les médias, des politiques, des journalistes et des philosophes dénoncent la violence intrinsèque du port de ce vêtement, à l’encontre des femmes. Alors qu’en France au moins 75 000 femmes sont violées chaque année, qu’une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint, et ce dans une indifférence quasi totale, que l’accès à l’avortement est remis en cause par les politiques d’austérité et que les femmes sont toujours moins payées que les hommes, une partie de la classe politique se découvre subitement une passion pour leurs droits et se fait le chantre de la défense de leurs libertés en prenant des mesures coercitives… sur la façon dont des femmes doivent s’habiller. On voit bien que tous ces individus ne se préoccupent du sort des femmes que lorsque cela les arrange, c’est à dire lorsque cela permet de stigmatiser un peu plus la population de confession musulmane. L’application de telles mesures n’aura en réalité pour seul effet que de permettre à des policiers d’humilier des femmes en les forçant à retirer leurs vêtements.
En montant en épingle le fait que quelques femmes portent cette tenue (l’un des maires LR partisan de cet arrêté a reconnu qu’aucune femme portant le burkini n’a jamais été observée sur les plages de sa commune), l’objectif n’est autre que de se livrer à une surenchère sur les questions identitaires, en vue de diviser un peu plus les travailleurs et de détourner l’attention des réels enjeux sociaux, économiques et politiques. Derrière les arguments fallacieux et hypocrites de défense de la laïcité et d’égalité entre hommes et femmes, le message envoyé à la population musulmane, souvent issue ou associée aux anciennes colonies françaises, est clair : vous n’êtes toujours pas des citoyens comme les autres et l’on ne veut pas de vous en France. Si la polémique cible spécifiquement le burkini, c’est en réalité tous les comportements liés de près ou de loin à la pratique de l’islam qui sont ciblés. Les musulmans de France sont ainsi sommés de se faire discrets comme l’a clairement exprimé Chevènement.
La crise organique du capitalisme à l’échelle mondiale oblige la classe dirigeante à détourner l’attention des masses de la lutte de classe qui s’intensifie. Le mouvement ouvrier et ses militants doivent être d’autant plus attentifs à ne pas tomber dans les pièges que nous tendent la bourgeoisie et ses serviteurs. C’est particulièrement vrai lorsqu’elle drape sa propagande islamophobe et raciste derrière les oripeaux de la défense de la laïcité ou l’instrumentalisation hypocrite des droits des femmes.