Les 1er et 2 juillet derniers, près de 150 personnes se sont réunies à Edmonton pour la quatrième édition annuelle de l’École marxiste d’été de l’Ouest canadien. Organisée sur le thème « Le marxisme, la philosophie de la révolution », cette édition à été la plus grande à ce jour. Le succès de l’événement montre la croissance des marxistes de l’Ouest canadien et la soif d’idées révolutionnaires dans ce que l’on appelle le « Texas du Canada ».
L’école a également attiré des révolutionnaires du reste du Canada et de l’international. Le nombre de participants en provenance de l’Est a atteint un niveau record : 16 personnes venant du Québec et 26 de l’Ontario. Trois personnes sont venues des États-Unis et une d’Argentine. En tant qu’internationalistes, les marxistes de l’Alberta sont fiers que notre événement ait pu contribuer à l’éducation de camarades d’ailleurs dans le monde.
La lutte pour la philosophie marxiste
Alors qu’un sondage montre qu’un million de jeunes veulent le communisme au Canada, le moment est bien choisi pour se lever et défendre la philosophie révolutionnaire du marxisme. Les crises environnementales et sociales qui font rage poussent des millions de personnes à remettre en question les idées dépassées du capitalisme. Beaucoup sont à la recherche d’explications révolutionnaires. L’Ouest canadien ne fait pas exception à la règle, comme le montre la croissance de cet événement.
La première journée a commencé par une discussion sur l’Histoire de la philosophie, lancée par une présentation de Holly, militante de La Riposte socialiste en Alberta. Le marxisme nous offre une façon profonde d’examiner le développement de la pensée humaine. En lançant la discussion, Holly a expliqué les lois qui sous-tendent le développement des idées, la réponse marxiste aux principaux débats de la philosophie. Le marxisme est le résultat du long développement historique de la philosophie. La philosophie a toujours fait partie de la lutte des classes, et le marxisme le reconnaît consciemment, en se plaçant du côté de la classe ouvrière.
La philosophie n’est pas seulement une question abstraite. Le marxisme est une philosophie de l’action. Comme le disait Marx : « Les philosophes n’ont fait qu’interpréter le monde de différentes manières, ce qui importe c’est de le transformer. » Avec le marxisme, la tâche de la philosophie n’est pas seulement de s’asseoir et de penser, elle est de changer le monde. Le marxisme est une arme dans les mains de la classe ouvrière. Les marxistes comprennent qu’il existe un monde objectif que nous pouvons comprendre grâce à l’investigation scientifique. Armée de cette analyse scientifique, la classe ouvrière peut changer le monde.
Cependant, la majeure partie de la gauche d’aujourd’hui a capitulé devant la philosophie du postmodernisme, comme l’a expliqué Josie, de La Riposte socialiste en Alberta, dans son introduction à la séance sur le Marxisme et la philosophie postmoderne. Ces deux écoles de pensée sont totalement opposées. Le postmodernisme est basé sur la philosophie de l’idéalisme subjectif, il nie que la connaissance objective et scientifique soit possible. Il sème ainsi la division et occulte les véritables lois à l’œuvre dans la société, désarmant la classe ouvrière. C’est pourquoi la lutte contre les idées réactionnaires du postmodernisme est vitale pour les marxistes dans leur combat pour changer le monde.
Une théorie profonde
Nos détracteurs accusent souvent les marxistes de « déterminisme économique ». On nous dit que nous réduisons tout à l’économie. Rien n’est plus faux. Le marxisme est bien plus profond que juste l’économie. C’est une théorie riche qui peut être appliquée à tous les aspects de la vie, de l’économie aux mathématiques, en passant par la science et l’art, révélant les lois qui régissent le développement de ces choses. Mais en dernière analyse, les sociétés, quelle que soit leur culture ou l’idéologie dominante qui y règne, doivent toutes produire les nécessités de la vie. Cela signifie que les pressions économiques s’exercent en permanence. Loin d’effacer les contributions des individus, le marxisme montre que les individus jouent un rôle essentiel dans le développement des idées, mais pas indépendamment du temps et du lieu.
Lors de cette école d’été, l’enthousiasme pour les explications profondes du marxisme était palpable, en particulier lors de la discussion sur le Marxisme et la science. Une présentation de Chase, militant de La Riposte socialiste à Edmonton, a mis en évidence les lois dialectiques de la nature elle-même. La discussion a couvert un large éventail de sujets, de l’origine de la conscience humaine à la cosmologie et aux mathématiques, en passant par la nécessité d’une philosophie scientifique consciente. Une leçon s’est imposée : la crise du système capitaliste a engendré une crise de la science. En libérant les personnes les plus talentueuses d’un travail dénué de sens et du carcan du financement capitaliste, une société socialiste libérerait la science des chaînes de l’impératif du profit.
Comment changer le monde
En tant qu’outil de lutte, la théorie marxiste nous aide à analyser la société et à orienter notre action politique dans la bonne direction. C’est ce qui est ressorti de la séance consacrée à la crise en Alberta. La classe ouvrière albertaine va subir quatre années supplémentaires d’un gouvernement de Danielle Smith. Et la crise environnementale, qui radicalise des millions de jeunes, fait rage.
La technologie existe pour s’attaquer aux changements climatiques et aux crises environnementales telles que les puits de pétrole abandonnés. Mais le capitalisme est totalement incapable de régler ces problèmes, pour la simple raison qu’il n’est pas rentable de le faire. Cependant, l’aggravation de la crise obligera la classe ouvrière à se battre, tôt ou tard. La classe ouvrière aura de nombreuses occasions de prendre le pouvoir dans les années à venir, pour créer une société socialiste où les humains pourront enfin vivre en harmonie avec la nature.
Mais pour ce faire, la classe ouvrière a besoin d’une direction révolutionnaire, guidée par la meilleure théorie, dont découle la tactique. Telle était la principale leçon de la discussion sur la Révolution allemande de 1919-1923. La véritable histoire de la révolution allemande est aujourd’hui largement occultée. Cette magnifique révolution a mis fin à la Première Guerre mondiale. Ses répercussions ont ébranlé le monde entier, jusqu’au Canada.
La période qui a suivi la Première Guerre mondiale en était une de révolution mondiale. L’Allemagne était au cœur de cette révolution mondiale. Mais malgré de nombreuses occasions de prendre le pouvoir, faute de leadership révolutionnaire, la classe ouvrière allemande a été vaincue. Cette défaite a bouleversé l’ensemble de la classe ouvrière mondiale et a changé le cours de l’histoire.
Mais la tâche des marxistes n’est pas de pleurer le passé. Il s’agit de le comprendre. En utilisant la méthode marxiste, nous pouvons tirer les leçons des luttes passées. Et comme la discussion l’a révélé, la révolution allemande est pleine de leçons sur la stratégie révolutionnaire, surtout sur la nécessité d’un parti révolutionnaire. En tirant ces leçons et en les utilisant dans la lutte aujourd’hui, nous pouvons nous assurer que la lutte des travailleurs allemands n’ait pas été vaine.
En défense du marxisme
Lors de la dernière session sur En défense du marxisme, Joel Bergman, rédacteur de Fightback, a rassemblé toutes ces leçons. Il a donné un aperçu du débat au sein du Parti socialiste ouvrier américain (Socialist Workers Party) dans les années 1930 sur la nature de classe de l’Union soviétique. Les désaccords dans ce débat étaient des désaccords philosophiques sous-jacents. Dans ce débat, Trotsky a défendu la méthode marxiste en tant qu’outil fondamental dans la lutte des classes.
Ce débat montre la manière inconsciente dont les idées se développent en fonction de la position des différentes classes dans la société et du conflit entre ces classes. Cela se produit d’une manière étonnamment dynamique.
La leçon tirée par Joel est avant tout qu’une organisation révolutionnaire doit être dotée d’une philosophie claire propre à la classe ouvrière. Rester sur une ligne politique correcte exige la philosophie marxiste la plus avancée. Mais dans la société capitaliste, les idées dominantes sont celles de la classe capitaliste. Sans une lutte constante pour une philosophie de la classe ouvrière, ces idées contamineront le parti révolutionnaire, le désarmant de fait.
Un événement marquant
À la fin de l’événement, le sentiment dominant était l’enthousiasme. Les participants ont exprimé leur désir de cultiver leur compréhension de la théorie marxiste. Ils étaient également enthousiastes à l’idée de mettre ces idées en pratique. Cet événement a constitué une étape importante dans l’éducation des forces du marxisme à la théorie révolutionnaire, ce qui leur permettra de comprendre les méandres de la politique d’aujourd’hui.
Juste après la première école d’été de l’Ouest, nous écrivions : « Nous espérons faire de l’École marxiste d’été d’Edmonton un point de ralliement annuel pour tous ceux qui s’intéressent au marxisme révolutionnaire dans l’Ouest du pays! » Quatre ans plus tard, nous avons fait un grand pas vers cet objectif.