Le gouvernement libéral a passé des années à attirer les étudiants étrangers afin de s’en servir comme main-d’œuvre bon marché et comme vache à lait pour les universités. Mais maintenant, il s’attaque à eux et met des dizaines de milliers d’entre eux à risque de déportation.
Attaques
Au cours de la dernière année, les restrictions imposées aux étudiants étrangers se sont multipliées. En décembre, les libéraux ont commencé à demander aux étudiants étrangers de prouver qu’ils disposaient de 20 635 dollars, au lieu des 10 000 dollars exigés depuis deux décennies. Puis, en janvier, ils ont réduit de 35% le nombre de permis d’études délivrés. En avril, ils ont limité le nombre d’heures que les étudiants internationaux sont autorisés à travailler à 20 heures par semaine.
Ces restrictions financières sont synonymes de pauvreté et de désespoir pour des milliers d’étudiants déjà en difficulté.
Puis, le 18 septembre dernier, ils ont annoncé une réduction supplémentaire de 10% des permis d’études pour la prochaine année, ainsi que des restrictions concernant les bénéficiaires de permis de travail postdiplôme (PTPD), qui permet aux étudiants internationaux d’accéder à la résidence permanente. On estime qu’entre 70 000 et 130 000 étudiants étrangers titulaires d’un PTPD verront leur permis expirer au cours des deux prochaines années, ce qui les mettra à risque de déportation.
Le ministre de l’Immigration, Marc Miller, a invoqué la nécessité de lutter contre les « usines à diplômes », soit les écoles de qualité médiocre qui attirent les étudiants en leur faisant miroiter, souvent à tort, la possibilité d’obtenir la résidence permanente ou la citoyenneté. Mais ce n’est pas comme si le gouvernement n’était pas au courant de ce problème. En fait, il a délibérément contribué à l’empirer.
Exploitation
Les universités canadiennes comptent de plus en plus sur l’exploitation des étudiants étrangers pour financer leurs activités, tandis que le gouvernement incite ces étudiants à rester et à travailler afin de soutenir l’économie.
Dans les années 1980, les provinces ont commencé à libéraliser les frais de scolarité des étudiants étrangers, laissant aux universités le soin de les fixer eux-mêmes. Naturellement, elles ont choisi d’augmenter ces frais et de compter de plus en plus sur l’exploitation des étudiants étrangers pour assurer leurs revenus, alors que leur financement était réduit. En fait, les frais de scolarité des étudiants étrangers représentent 100% de l’augmentation des dépenses de fonctionnement des universités entre 2007 et 2021. Aujourd’hui, les étudiants étrangers paient en moyenne quatre fois plus que les autres étudiants pour le même enseignement.
Mais ils sont également exploités en tant que réservoir de main-d’œuvre bon marché. Pendant la pandémie, les libéraux ont accordé la résidence permanente à 90 000 travailleurs temporaires et titulaires de PTPD en 2021 afin de remédier aux pénuries de main-d’œuvre. Ils ont ensuite continué à augmenter l’octroi de PTPD jusqu’à ce qu’il y en ait 396 235 en 2023, soit trois fois plus qu’en 2018.
Les libéraux ne se contentaient pas d’autoriser passivement les universités à attirer de la main-d’œuvre étrangère, ils les y encourageaient activement. Mais aujourd’hui, ils ont fait un virage à 180 degrés et, comme le dit Miller, « la logique qui veut que l’on fasse appel à de la main-d’œuvre étrangère sans plafond ou sans contrôle n’existe plus. » Cela démontre clairement que toutes les déclarations de Trudeau sur l’accueil chaleureux du Canada aux immigrants n’étaient que des paroles en l’air.
La classe dirigeante canadienne n’a défendu une politique plus ouverte que tant qu’elle pouvait en tirer profit. Maintenant que l’économie va moins bien, les libéraux se tournent vers les immigrants comme boucs émissaires, se rangeant ainsi du côté des conservateurs. En effet, l’argument du gouvernement repose sur l’idée que les étudiants étrangers « exercent une pression » sur nos logements, nos systèmes de santé et nos infrastructures en général. Mais pas besoin d’être un génie pour comprendre que les problèmes de logement et le sous-financement des soins de santé et d’autres services sociaux sont bien antérieurs à la situation actuelle.
Ces attaques contre les étudiants étrangers n’amélioreront pas la vie des gens ordinaires. Tout gouvernement capitaliste, qu’il soit conservateur ou libéral, continuera à saccager les services publics et à permettre aux capitalistes de nous exploiter. L’expulsion des étudiants étrangers n’y changera rien.
Un statu quo intenable
Les patrons d’université tenteront sans doute de récupérer l’argent perdu auprès des étudiants étrangers en augmentant les frais de scolarité des étudiants nationaux et en supprimant des centaines d’emplois sur les campus. Ils forceront ainsi les étudiants à payer les attaques contre l’immigration avec l’argent de leurs propres frais de scolarité.
Toutefois, il ne suffit pas d’exiger que les étudiants étrangers aient le droit de rester et de travailler. Dans les conditions actuelles, cela signifierait exiger le droit pour les étudiants étrangers de payer des frais de scolarité exorbitants et d’occuper les emplois d’hyper-exploitation pour s’en sortir.
Ce statu quo est intenable. La société est bien assez riche pour offrir de bons logements, de bons emplois et une éducation gratuite à tous les Canadiens et à tous les nouveaux arrivants sans aucune distinction. Les vrais coupables ne sont pas les pauvres immigrants qui ont fait de grands sacrifices pour venir étudier et travailler au Canada, mais les riches capitalistes qui réalisent des profits records alors que nous souffrons tous.
Nous devrions également nous demander pourquoi tant de jeunes partout dans le monde ressentent le besoin d’émigrer pour augmenter leur chance d’un avenir meilleur. Ce n’est pas un hasard si des millions de personnes cherchent à émigrer vers des pays comme le Canada pour y trouver un meilleur emploi ou une meilleure éducation. Le bloc impérialiste occidental, dont le Canada fait partie, a pillé les pays du monde entier, laissant peu de chances à des centaines de millions de personnes d’avoir une bonne vie. Les jeunes du monde entier n’ont d’autre choix que de venir gagner leur vie dans le ventre de la bête impérialiste.
Non seulement devons-nous exiger les mêmes droits démocratiques pour ceux qui immigrent que pour les personnes nées ici, mais nous devons également lutter pour le renversement des impérialistes qui privent les uns et les autres d’un avenir.