Depuis l’attaque du Hamas du 7 octobre, toute la classe dirigeante canadienne et ses laquais se sont levés d’un coup pour soutenir Israël. Dans ce processus, ils obscurcissent les souffrances et l’oppression dont les Palestiniens sont constamment victimes. 

Les politiciens capitalistes et la presse soi-disant « libre » démonisent le mouvement de solidarité avec la Palestine. Quiconque défend la libération de la Palestine est accusé de défendre le terrorisme ou d’être un antisémite. 

Nous devons résister aux mensonges et aux calomnies de la classe dirigeante. Devant leurs attaques, le mouvement ouvrier et la gauche doivent prendre le bord des opprimés sans réserve, et bâtir un large mouvement de solidarité avec le peuple palestinien.

Hypocrisie

Naturellement, le gouvernement de Justin Trudeau s’est immédiatement prononcé en faveur du « droit d’Israël de se défendre ». Pierre Poilievre a bien sûr suivi, ainsi que tous les gouvernements provinciaux. 

Rapidement, chaque déclaration, chaque article dans les médias a été cadré pour que quiconque prenant la défense des Palestiniens soit dépeint comme un défenseur du terrorisme. Tous les politiciens étaient mis sous la pression des médias et des partis bourgeois pour qualifier le Hamas de groupe terroriste et le dénoncer, ignorant au passage la situation désespérée des Palestiniens depuis des générations.

C’est Thomas Mulcair, le libéral autrefois dirigeant du NPD, qui a exprimé l’opinion de la classe dirigeante de la manière la plus crasse, affirmant qu’il « n’y a pas deux côtés » dans cette histoire. Toutes les tentatives de résistance pacifique des Palestiniens dans les dernières années ont été accueillies par la répression, mais qu’importe : il n’y a que le Hamas qui attaque!

Tandis que des manifestations de solidarité avec le peuple palestinien faisaient irruption partout au Canada, la classe dirigeante et leurs médias s’en sont pris aux manifestants en les présentant comme des défenseurs du terrorisme, certains allant aussi loin que d’affirmer qu’ils « célébraient le meurtre de masse d’Israéliens ». 

Trudeau a condamné la soi-disant « glorification de la mort, de la violence et de la terreur ». Au Québec, François Legault a trouvé « honteux », « inacceptable » que des centaines de manifestants prennent la rue à Montréal pour soutenir la Palestine. Tous deux ont menti en affirmant que les manifestants étaient là pour soutenir le Hamas, alors qu’en fait, comme nos propres témoins oculaires peuvent l’attester, il n’y a eu aucune expression d’appui de ce type, que ce soit dans les manifestations de Montréal ou de Toronto. Bien entendu, aucun journaliste n’a essayé de vérifier les affirmations des politiciens.

Mais on peut se demander : qui est vraiment du côté de la violence et de la mort? Les représentants du gouvernement israélien parlent de traiter les Gazaouis comme des « animaux » et de transformer Gaza en un campement de fortune où il n’y aurait plus de bâtiments. Le fait que Trudeau et ses acolytes ailleurs dans le monde enjoignent Israël à se conformer « au droit international » ne change rien à l’affaire, quand le gouvernement israélien lui-même a déjà rendu clair qu’il ne respectera aucune règle. 

Les forces israéliennes ont déjà rasé des quartiers entiers, pris pour cible des écoles et des hôpitaux par des frappes aériennes. Ce n’est que le début. Le 13 octobre, des avions israéliens ont largué des tracts sur le nord de Gaza, informant les 1,1 million d’habitants de la région qu’ils avaient 24 heures pour évacuer, faute de quoi ils se mettraient « en danger extrême ». Il s’agit d’un nettoyage ethnique, soutenu par les puissances occidentales.

Et prendre la rue contre le bain de sang qui s’en vient à Gaza, ce serait soutenir la terreur et la violence?

Trudeau a bien montré l’hypocrisie sans bornes de la classe dirigeante lorsque questionné à savoir s’il condamnait le blocus complet de Gaza— un blocus où l’eau, le gaz et l’électricité sont coupés, ce qui entraînera famine, souffrance et mort pour des milliers de civils. Il a simplement évité la question et s’est contenté d’entonner sa cassette : Israël a « le droit de se défendre conformément au droit international ». Mais un tel châtiment collectif est en fait un crime de guerre et une violation flagrante du « droit international ».

Le fait que plus de 200 Palestiniens avaient été tués cette année seulement, que des colons protégés par la police et l’armée assassinent des Palestiniens et volent leurs terres dans l’impunité totale, qu’Israël compte sur le gouvernement le plus loin à droite de son histoire, et que des membres du gouvernement parlent d’infliger une nouvelle « Nakba » aux Palestiniens; tous ces faits et les autres innombrables crimes de l’impérialisme israéliens ont été balayés sous le tapis. 

Les laquais de l’impérialisme canadien sont incapables de l’admettre, mais ce sont ces crimes de l’État sioniste qui ont poussé à bout les Palestiniens.

Dans le monde de l’impérialisme, les opprimés sont présentés comme les oppresseurs, les terroristes, les violents et les meurtriers. Les oppresseurs, quant à eux, deviennent les opprimés, qui ont le droit de commettre les pires atrocités avec le silence complice des grandes puissances.

Antisémitisme?

Comme à chaque fois qu’il est question de la Palestine, toute défense de l’opprimé palestinien contre l’impérialisme israélien est présentée comme de l’antisémitisme.

Le président de la branche ontarienne du Syndicat canadien de la fonction publique (CUPE Ontario), Fred Hahn, a été sali dans les médias et bombardé d’appels à sa démission à cause de cette publication sur X (anciennement Twitter) le 8 octobre : « Je suis reconnaissant pour le pouvoir des travailleurs, le pouvoir de la résistance tout autour du globe. » Le syndicat s’est porté à la défense du président, dénonçant les attaques contre lui comme provenant du « très organisé lobby pro-Israël ». 

Le ministre fédéral du Travail s’est joint à la fête, accusant le syndicat de propager l’antisémitisme! 

Ce niveau d’hypocrisie atteint le comique. Monsieur le ministre semble avoir la mémoire plutôt courte : a-t-il déjà oublié qu’il a applaudi un nazi au Parlement le mois dernier? 

La même accusation a été portée contre une députée provinciale ontarienne affiliée au NPD, Sarah Jama. Celle-ci a été accusée d’antisémitisme pour une publication appelant à un cessez-le-feu, et qualifiant l’occupation de la Palestine « d’apartheid ». Elle ajoute cette phrase douce : « Je suis de tout cœur avec tous ceux qui sont touchés par cette violence persistante ». Ce sont ces commentaires qui ont été qualifiés d’ « odieux » par le Centre pour Israël et les affaires juives.

Doug Ford, le premier ministre conservateur ontarien, a appelé à sa démission, citant son prétendu « historique bien documenté d’antisémitisme ». On se demande si Doug Ford en a parlé à son amie et partisane Faith Goldy, militante suprémaciste blanche et antisémite notoire. 

Les conservateurs et les libéraux sont les derniers à pouvoir faire la morale à quiconque sur un prétendu antisémitisme. 

Pendant ce temps, la chroniqueuse du National Post Barbara Kay a publié sur X, le 11 octobre : « Israël ne *veut* pas de nettoyage ethnique à Gaza. Israël a *besoin* de nettoyer Gaza du Hamas pour mettre fin à son action génocidaire. » Terry Glavin, un autre chroniqueur du National Post et du Ottawa Citizen, a écrit sur son Substack qu’il est difficile de voir comment Israël devrait traiter la Cisjordanie et la bande de Gaza, si ce n’est en les « réduisant en miettes ». Il ne s’agit là que de deux exemples du chœur des gens de droite qui applaudissent à tout rompre l’extermination des Palestiniens.

Et qui, dans les grands médias ou parmi les libéraux et les conservateurs, condamne ces appels au meurtre de masse et aux crimes contre l’humanité?

Couardise à gauche

Les grands événements mondiaux comme ceux en Palestine mettent la gauche et le mouvement ouvrier devant le choix de défendre les opprimés, ou de prendre le côté de leur classe dirigeante.

À quelques honorables exceptions près, la gauche au Canada a misérablement échoué le test et capitulé à la pression de l’opinion publique bourgeoise.

Le NPD de Jagmeet Singh a réussi une contorsion spectaculaire. Non content de simplement dénoncer le Hamas comme le reste de la classe dirigeante, il rend le Hamas responsable… des attaques de l’État d’Israël! Une déclaration du parti explique :

« Les civils de Gaza sont pris dans un horrible cycle de violence; comme les civils israéliens tués ces derniers jours, les Gazaouis sont victimes de la brutalité du Hamas. Les bombardements israéliens sur les habitations et les infrastructures civiles de Gaza, où plus de la moitié de la population est constituée d’enfants, ont tué des centaines de Palestiniens et anéanti des familles entières. » (C’est nous qui soulignons)

Ainsi, si le gouvernement israélien anéantit Gaza et tue des milliers de civils tel qu’il planifie de le faire, ce sera la faute du Hamas, et non de ce gouvernement d’extrême droite. Entre cela et dire que les Palestiniens « l’ont cherché », il n’y a qu’un pas. 

Devant les accusations d’antisémitisme mentionnées plus haut, la dirigeante du NPD ontarien Marit Stiles a demandé à sa députée de retirer sa publication, et s’est distancée de ses propos. Jama s’est finalement excusée. Malheureusement, ces excusent renforcent l’idée que critiquer Israël revient automatiquement à de l’antisémitisme.

Au Québec, Québec solidaire a également plié sous la pression. Ce parti était autrefois mené par Amir Khadir, qui affirmait que la création d’Israël avait été une injustice et une catastrophe. Mais cette fois-ci, la réponse du co-porte-parole Gabriel Nadeau-Dubois aux événements du 7 octobre était presque impossible à distinguer de celle des autres formations politiques : « Condamnation totale des attaques du Hamas », suivi de quelques vides phrases pacifistes qui évitent toute critique du régime sioniste. 

Depuis lors, avec l’attaque monstrueuse d’Israël sur Gaza, GND a publié une autre déclaration expliquant : « La bonne manière de répondre aux attaques du Hamas, ce n’est pas de se ranger sans nuances derrière ce gouvernement extrémiste [celui de Nétanyahou]. » Mais nulle part on n’y explique qui est l’oppresseur et qui est l’opprimé. Le tout est présenté sous l’angle de « comment répondre au Hamas ». Le nombre incalculable de morts et la souffrance infinie infligée aux Palestiniens sont mis sur le même pied que l’attaque du Hamas. 

On est bien loin du parti qui a exprimé sa solidarité avec la Palestine lors du précédent conflit en 2021, où le parti visait par leur propagande la violence de l’État israélien d’abord.

Il est ironique que c’est précisément au moment où la solidarité de la classe ouvrière avec la Palestine est plus que jamais nécessaire qu’elle est largement abandonnée par les organisations ouvrières et de gauche. 

Autre exemple : au Québec, la CSN a voté à son congrès de mai dernier, coïncidant avec le 75e anniversaire de la Nakba, pour soutenir l’« Appel contre l’apartheid des syndicats palestiniens ». 

La CSN serait maintenant censée « faire pression sur le gouvernement canadien et québécois » pour qu’ils « soutiennent les efforts des Nations unies pour enquêter sur l’apartheid israélien ; qu’ils interdisent le commerce des armes et la coopération militaro-sécuritaire avec Israël ; qu’ils suspendent les accords de commerce avec Israël qui sont complices de l’apartheid et de l’occupation militaire israéliens et qu’ils interdisent le commerce avec les colonies israéliennes illégales. »

Pourtant, c’est silence radio à la CSN depuis le 7 octobre – comme chez toutes les autres centrales syndicales au Québec, par ailleurs. À quoi a bien pu servir cette résolution? Cela fait penser à un parapluie plein de trous : inutile précisément quand il devrait servir.

À leur crédit, Fred Hahn et le SCFP ontarien n’ont pas plié face au déluge d’articles calomnieux et de déclarations incendiaires de politiciens contre les déclarations du leader syndical qualifiées faussement d’antisémites. La gauche ne devrait jamais s’excuser pour des crimes qu’elle ne commet pas. 

Malheureusement, la majeure partie de la gauche et du mouvement syndical a révélé sa lâcheté, soit par son silence, soit par sa capitulation.

Contre l’hypocrisie des impérialistes! Palestine libre!

La guerre en Israël-Palestine met à nu l’hypocrisie révoltante de la classe dirigeante. Ne devrait-on pas s’attendre à ce que ces gens qui se sont pliés en quatre pour soutenir l’Ukraine contre l’invasion russe aident les pauvres Palestiniens qui luttent contre l’occupation et les bombardements du puissant régime impérialiste israélien? Malgré les mensonges et les falsifications de la classe dirigeante, le double standard saute aux yeux.

Tandis qu’Israël se prépare à écraser Gaza et à infliger des souffrances incalculables aux Palestiniens avec le soutien total de la classe dirigeante canadienne, nous avons un devoir en tant que membres de la classe ouvrière internationale. Le mouvement syndical, le mouvement étudiant et la gauche au Canada doivent construire un puissant mouvement de solidarité avec les Palestiniens.

Il faut commencer par dénoncer ouvertement l’hypocrisie de l’establishment et rejeter ses tentatives de dépeindre la solidarité comme pro-terroriste ou antisémite. Ce sont eux qui défendent l’oppression et la violence, en aidant le régime israélien à perpétrer son massacre.

Des manifestations de masse devraient être organisées dans toutes les villes possibles avec le soutien total et actif des syndicats. Jusqu’à présent, les rassemblements ont été principalement organisés par les courageux militants pro-Palestine. Mais avec les ressources et l’appui actif de l’ensemble du mouvement syndical, ces manifestations pourraient réellement prendre un caractère de masse.

Là où des travailleurs canadiens sont impliqués dans la production ou la livraison d’armes à Israël, ceux-ci devraient s’organiser pour cesser cette production et cette livraison. Les travailleurs constituent la force la plus puissante de la planète et, par leur position dans la production, ils peuvent nuire à la machine de guerre israélienne. Cela a déjà été fait, par exemple en Italie et en France, pour empêcher les livraisons d’armes destinées au Yémen. Cela peut être fait ici aussi!

Partout dans le monde, le système capitaliste engendre la faim, la pauvreté, la souffrance et la guerre. Il n’y a nulle part où cela est plus vrai qu’en Palestine. Les appels vides à la « paix » lancés par nos dirigeants et les réformistes ne résoudront rien.

Ce dont nous avons besoin, c’est d’une transformation socialiste complète de la société. La meilleure façon d’aider dans la situation actuelle est de mobiliser la classe ouvrière en solidarité et de renverser notre propre classe dirigeante canadienne, qui a le sang des Palestiniens sur les mains.

C’est pourquoi nous voulons faire entendre la voix du communisme au sein du mouvement. Rejoignez-nous!