Nous publions ci-dessous la deuxième partie du Manifeste de la Tendance Marxiste Internationale (TMI) sur la révolution arabe. Lire icila première partie. Pour l’essentiel, ce texte a été achevé le 14 mars dernier. Nous publierons prochainement la troisième partie.
Les revendications démocratiques
Dans un premier temps, les révolutionnaires avancent des revendications démocratiques. Evidemment ! Après des décennies de dictature brutale, la jeunesse et les travailleurs ont soif de liberté. Naturellement, leur soif de démocratie peut être exploitée par des politiciens bourgeois qui ne s’intéressent qu’à leur future carrière dans un parlement « démocratique ». Mais nous devons nous saisir des revendications démocratiques et leur donner un contenu nettement révolutionnaire. Elles mèneront inévitablement à la revendication d’une transformation plus fondamentale de la société.
Pendant une grève ou une révolution, les gens se sentent comme des êtres humains ayant une dignité et des droits. Après toute une vie de silence forcé, ils découvrent qu’ils ont une voix. Des pauvres et des illettrés disent : nous allons nous battre ; nous ne quitterons pas les rues ; nous voulons des droits, nous voulons être traités avec respect. C’est quelque chose de profondément progressiste. C’est l’essence même d’une authentique révolution.
Il va sans dire que les marxistes subordonnent toujours les revendications démocratiques à l’objectif de la révolution socialiste. Dans la pratique, les revendications démocratiques les plus consistantes mèneront forcément à la question du pouvoir ouvrier et de la révolution socialiste. La révolution russe en est le meilleur exemple. En 1917, les bolcheviks ont pris le pouvoir sur la base du mot d’ordre : « La paix, le pain et la terre ». Aucune de ces revendications n’a de contenu socialiste. En théorie, elles peuvent être satisfaites sous le capitalisme. Dans la pratique, cependant, elles ne pouvaient être satisfaites qu’en rompant avec la bourgeoisie et en transférant le pouvoir dans les mains de la classe ouvrière.
Certains prétendent qu’il ne s’agit de rien de plus que d’un mouvement bourgeois-nationaliste. Cela révèle à quel point ils ignorent l’importance des revendications démocratiques dans de telles conditions. L’expérience de la révolution russe a montré l’importance d’une utilisation correcte (révolutionnaire) des revendications démocratiques. La revendication d’une Assemblée Constituante a joué un rôle très important dans la mobilisation révolutionnaire de larges couches de la population.
Tout en luttant pour les revendications démocratiques les plus avancées, les marxistes ne les considèrent pas comme des fins en soi, mais comme faisant partie intégrante d’une transformation radicale de la société. C’est ce qui distingue le point de vue marxiste du point de vue bourgeois-démocrate.
La tâche immédiate, en Egypte, était de renverser Moubarak et son régime corrompu. Mais ce n’est que le premier pas. Cela a ouvert les vannes et permis au peuple révolutionnaire de faire irruption. Chaque jour, il découvre ses forces dans la rue, ainsi que l’importance de l’organisation et des mobilisations de masse. C’est déjà une énorme conquête. Après 30 ans de dictature, ils ne permettront pas qu’on leur en impose une autre – ou toute intrigue visant à recréer l’ancien régime sous un autre nom. On le voit bien en Tunisie.
A présent qu’elles ont goûté à leur propre pouvoir, les masses ne se satisferont pas de demi-mesures. Elles savent qu’elles doivent ce qu’elles ont conquis à leur propre action. La lutte pour la démocratie complète permettra de construire d’authentiques syndicats et partis ouvriers. Mais cela posera aussi la question de la démocratie économique et de la lutte contre les inégalités.
Les mots d’ordre et les tactiques doivent être concrets. Ils doivent refléter la situation réelle et les véritables préoccupations des masses. Les tâches objectives de la révolution russe étaient démocratiques et nationales : renversement du tsar, démocratie, affranchissement de l’impérialisme, liberté de la presse, etc. Nous demandons la démocratie complète, l’abolition immédiate de toutes les lois réactionnaires et une Assemblée Constituante.
Oui, nous devons renverser le vieux régime : non seulement Ben Ali et Moubarak, mais aussi tous les « petits Ben Ali » et « petits Moubarak ». Il faut une grande purge au sein de l’appareil d’Etat. Pas une seule personnalité liée au vieux régime ne doit faire partie du gouvernement. Pourquoi le peuple révolutionnaire, qui a tout sacrifié dans la lutte, laisserait-il le pouvoir à ceux qui n’ont joué aucun rôle, même sous la forme d’un gouvernement provisoire ? Il faut prendre un grand balai et les balayer tous ! C’est notre première revendication. On ne peut pas accepter moins que cela.
Mais même cela est insuffisant. Pendant des décennies, ces gens ont volé et pillé le pays. Ils vivaient dans le luxe pendant que le peuple était réduit à la misère. A présent, ils doivent rendre chaque centime qu’ils ont volé au peuple. Nous demandons la confiscation immédiate des richesses et des propriétés de ces parasites. Et nous demandons l’expropriation des impérialistes qui les soutenaient. Ainsi, les revendications démocratiques mènent directement à des revendications socialistes.
La démocratie n’a pas la même signification pour tout le monde. Les pauvres ne luttent pas pour la démocratie dans le but d’élire des carriéristes à des positions dans l’appareil d’Etat, mais dans le but de résoudre leurs problèmes les plus brûlants : le manque d’emplois, de logements, le prix élevé de la vie, etc. Or ces problèmes économiques et sociaux sont trop profonds pour être réglés par un gouvernement capitaliste.
La démocratie n’est qu’un mot creux si elle se refuse à mettre la main sur les richesses obscènes de la clique dirigeante. Si elle est menée à son terme, la lutte pour la démocratie doit inévitablement mener à l’expropriation des banquiers et des capitalistes. Elle doit mener à l’établissement d’un gouvernement ouvrier et paysan. Sous Moubarak, les capitalistes égyptiens ont aidé l’impérialisme à piller les richesses du pays et à exploiter les travailleurs. Nous demandons l’expropriation des impérialistes au profit du peuple.
Pour l’abolition immédiate de toutes les lois réactionnaires !
Pour la complète liberté de réunion ! Pour le droit de s’organiser et de faire grève !
Pour une Assemblée Constituante révolutionnaire !
Pour la confiscation de toutes les richesses volées par le vieux régime !
Pour l’expropriation des impérialistes !
L’Assemblée Constituante
S’il y avait en Egypte un parti comme le Parti Bolchevik, la question du pouvoir serait directement posée. Mais en l’absence d’une direction dotée d’un plan clair, la révolution peut connaître toutes sortes de vicissitudes. Pour le moment, la vague révolutionnaire n’a toujours pas reflué. Mais les masses ne peuvent pas rester dans un état de mobilisation permanente. Elles doivent travailler et gagner leur vie. La lave révolutionnaire refroidira temporairement. La révolution passera par une phase de démocratie bourgeoise.
Dans un tel contexte, les revendications démocratiques ont une énorme importance. Elles sont un puissant levier pour mobiliser de larges couches de la population. Nous devons lutter pour tous les droits démocratiques : le droit de grève, le droit de vote, etc. Il est dans l’intérêt des travailleurs d’avoir le plus de liberté possible pour développer la lutte des classes. Il n’est pas indifférent, pour un travailleur, de vivre sous un régime totalitaire ou d’avoir des droits démocratiques fondamentaux.
Le mot d’ordre pour une Assemblée Constituante – comme tous les mots d’ordre – n’existe pas en dehors du temps et de l’espace. Dans les cas de la Bolivie et de l’Argentine, par exemple, nous nous y opposons. Mais ce mot d’ordre est correct dans le cas de l’Egypte et de la Tunisie. Les mots d’ordre doivent refléter les conditions concrètes de la lutte des classes et de son développement.
Pendant les soulèvements d’octobre 2003 et de mai-juin 2005, en Bolivie, le mot d’ordre pour une Assemblée Constituante était contre-révolutionnaire. Pourquoi ? Les travailleurs boliviens avaient organisé deux grèves générales et deux insurrections. Ils avaient constitué des formes de soviets : les Assemblées Populaires et les cabildos abiertos (meetings de masse). Ils auraient pu prendre le pouvoir. Les dirigeants de la COB (syndicat) auraient pu balayer le gouvernement et se placer à la tête du pays. Dans ces conditions concrètes, le mot d’ordre pour une Assemblée Constituante était une trahison. Il détournait l’attention des masses de leur tâche centrale – la conquête du pouvoir – vers les canaux du parlementarisme.
A l’époque, la Banque Mondiale et le Bureau pour les Initiatives de Transitions (une institution américaine) ont défendu l’idée d’une Assemblée Constituante en Bolivie. Cela souligne la nature contre-révolutionnaire de ce mot d’ordre. Il faut encore ajouter un petit détail : la Bolivie était déjà une démocratie bourgeoise. Dans le cas de l’Argentine, certains groupes de gauche ont avancé ce mot d’ordre après les émeutes de décembre 2001. Mais comme l’Argentine, elle aussi, était déjà une démocratie bourgeoise, ce mot d’ordre revenait à dire : « Nous n’aimons pas notre parlement bourgeois. Nous en voulons un autre à la place. »
Il faut être complètement aveugle pour ne pas voir que cela n’a rien à voir avec la situation en Egypte et en Tunisie. Après des décennies de dictature, il y aura forcément de grandes illusions dans la démocratie – et pas seulement au sein de la petite bourgeoisie. Cela détermine notre attitude. Nous sommes pour la démocratie, mais nous disons qu’il faut la démocratie complète. Nous sommes pour une nouvelle Constitution ; il faut donc une Assemblée Constituante. Mais nous ne faisons pas confiance à l’armée égyptienne pour la convoquer, et par conséquent cette lutte doit se poursuivre dans la rue.
Les marxistes n’ont pas une attitude mécanique à l’égard des revendications démocratiques, qui sont toujours subordonnées aux intérêts généraux de la révolution. Nous ne partageons pas l’attitude superstitieuse des petit-bourgeois vis-à-vis de la démocratie formelle. L’approfondissement de la révolution dévoilera les limites de la démocratie bourgeoise. A travers leur expérience, les travailleurs en viendront à comprendre la nécessité de prendre le pouvoir en main. Mais avant de comprendre les limites de la démocratie bourgeoise, ils doivent passer par son école. Cela suppose une lutte sérieuse pour les revendications démocratiques les plus avancées.
Le Conseil Militaire a soumis à référendum des amendements à la Constitution, rédigés par des « experts ». C’est complètement anti-démocratique. La Constitution de Moubarak ne peut pas être amendée. Elle doit être rejetée. Une Assemblée Constituante démocratique et révolutionnaire doit être convoquée pour discuter d’une nouvelle Constitution.
Le peuple révolutionnaire ne doit pas laisser le pouvoir à des généraux qui ont soutenu Moubarak jusqu’à la dernière minute. Les travailleurs ne peuvent faire confiance aux chefs de l’armée ou à un conseil d’« experts » désignés par eux et censés rédiger une Constitution démocratique. Nous sommes pour une Assemblée Constituante : un organe démocratiquement élu qui élaborera une nouvelle Constitution. C’est une revendication démocratique élémentaire.
Reste la question : qui convoquera l’Assemblée Constituante ? Là encore, on ne peut laisser les chefs de l’armée en décider. Donc la lutte doit se poursuivre dans les rues, les entreprises, dans la jeunesse et parmi les chômeurs – jusqu’à la victoire complète du combat pour la démocratie.
En Egypte comme en Tunisie, la situation est analogue à la Russie de 1905 et 1917 (et non à la Bolivie de 2003 et 2005). Nous devons utiliser les revendications démocratiques pour poser la question centrale du pouvoir ouvrier. Nous disons aux jeunes et aux travailleurs : « Vous voulez la démocratie ? Nous aussi ! Mais ne faites pas confiance à l’armée ou à El Baradei. Luttons pour une véritable démocratie ! » Aujourd’hui, en Egypte, en Tunisie et en Iran, la revendication d’une Assemblée Constituante est très appropriée.
Les travailleurs égyptiens ont déjà tiré les bonnes conclusions. C’est ce que révèle la déclaration des travailleurs de la métallurgie à Helwan qui, pendant la lutte, ont formulé les revendications suivantes :
1- Départ immédiat de Moubarak, de toutes les personnalités et de tous les symboles du régime ;
2- Confiscation des richesses et propriétés – dans l’intérêt des masses – de toutes les figures du régime, ainsi que de tous ceux dont la corruption est avérée ;
3- Tous les travailleurs affiliés aux syndicats contrôlés par le régime doivent en démissionner, en vue de créer des syndicats indépendants. Il faut préparer des conférences syndicales pour former de nouveaux syndicats.
4- La renationalisation des entreprises publiques qui ont été privatisées ou fermées, et la formation d’une nouvelle administration de ces entreprises, impliquant les travailleurs et les techniciens.
5- La formation de comités de travailleurs, dans toutes les entreprises, pour administrer la production et contrôler les prix et les salaires.
6- La convocation d’une Assemblée Constituante pour rédiger une nouvelle Constitution et l’élection de conseils populaires – sans attendre des négociations avec le vieux régime.
Ces revendications sont absolument correctes. Elles montrent un très haut niveau de conscience révolutionnaire et coïncident entièrement avec le programme des marxistes. Ce programme donne à la révolution égyptienne tout ce dont elle a besoin pour vaincre.
Les syndicats
La révolution pose la nécessité de s’organiser. Les syndicats sont partout et toujours la forme d’organisation la plus élémentaire des travailleurs. Sans organisation, la classe ouvrière n’est qu’une matière première pour l’exploitation. En conséquence, la construction et le renforcement des syndicats est une priorité absolue.
En Egypte et en Tunisie, les syndicats étaient étroitement liés au vieux régime répressif. Ils faisaient partie intégrante de l’Etat. Les directions étaient corrompues – et de nombreux dirigeants étaient membres du parti au pouvoir. Leur principale fonction était de faire la police dans la classe ouvrière. Cependant, la base syndicale était constituée d’honnêtes travailleurs.
Même dans les démocraties bourgeoises, les directions syndicales ont tendance à fusionner avec l’Etat. Mais l’histoire montre que lorsque la classe ouvrière entre en action, même les syndicats les plus corrompus et bureaucratisés subissent la pression de la classe ouvrière et sont transformés au cours de la lutte. Soit les vieux dirigeants s’adaptent et reflètent la pression des travailleurs, soit ils sont remplacés par d’autres dirigeants, prêts à se mettre à la tête du mouvement.
En Tunisie, les dirigeants nationaux de l’UGTT étaient complices du régime de Ben Ali. Ils étaient prêts à participer au gouvernement provisoire formé par Ghannouchi. Ils ont dû y renoncer sous la pression des travailleurs. Mais aux niveaux local et régional, l’UGTT a joué un rôle dirigeant dans la révolution. Dans certains endroits, comme à Redeyef, l’UGTT a de facto pris le pouvoir. Ailleurs, les structures syndicales ont joué un rôle clé dans l’organisation du mouvement révolutionnaire, via les comités révolutionnaires. Cela montre le rôle vital des syndicats comme véhicules de la révolution.
Il faut complètement nettoyer l’UGTT, à tous les niveaux, la purger de tous les bureaucrates liés à l’ancien régime – à commencer par son secrétaire général, Abdessalem Jerad, qui joue ouvertement le rôle de briseur de grèves. Un congrès national extraordinaire doit être immédiatement convoqué par les directions locales et fédérales qui sont animées par des militants de gauche. La démocratisation de l’UGTT, en vue de la placer au cœur du mouvement révolutionnaire, rencontrerait un écho enthousiaste parmi les travailleurs. Si les jeunes et les travailleurs ont été capables de renverser Ben Ali et Ghannouchi, ils devraient être en mesure d’écarter aussi les bureaucrates syndicaux corrompus qui les soutenaient.
En Egypte, les bureaucrates syndicaux étaient incapables d’empêcher la vague de grèves qui fut l’école préparatoire de la révolution. Les travailleurs égyptiens se mobilisent contre les dirigeants corrompus et luttent pour créer des syndicats démocratiques et militants. Ils font preuve d’un instinct de classe infaillible. La lutte démocratique n’est pas confinée à l’arène politique. Elle doit entrer dans les syndicats et les entreprises.
En Egypte, il semble qu’on s’oriente vers la constitution d’une Fédération Egyptienne des Syndicats Indépendants. Dans les conditions révolutionnaires actuelles, elle peut devenir la principale organisation des travailleurs égyptiens. Cependant, il serait erroné d’abandonner la lutte à l’intérieur des anciens syndicats, qui disposent toujours d’une assise de masse. Dans certains cas, des entreprises et des secteurs entiers verront surgir de nouveaux syndicats. Dans d’autres cas, les travailleurs prendront le contrôle des vieilles structures officielles.
Les capitalistes et les impérialistes comprennent l’importance centrale des syndicats. Ils y enverront leurs agents pour corrompre et tromper les travailleurs, pour les empêcher de s’orienter vers des idées révolutionnaires et socialistes. La CIA a des liens étroits avec l’AFL-CIO, la social-démocratie européenne et les prétendues Internationales syndicales. Ils s’efforceront également de contrôler le mouvement syndical égyptien.
Les travailleurs doivent se méfier de ces « amis » qui viennent pour les corrompre et miner la révolution de l’intérieur. Ils doivent aussi se méfier des soi-disant ONG qui ne sont que des agences déguisées de l’impérialisme. Le rôle de nombreuses ONG est de détourner les travailleurs de la voie révolutionnaire, de les noyer sous un millier de tâches triviales (charité, etc.) et de transformer des travailleurs révolutionnaires en bureaucrates bien payés. C’est un poison qui peut corrompre le mouvement ouvrier.
Le rôle des syndicats n’est pas de consolider le capitalisme, mais de le renverser. Notre tâche principale est de lutter pour l’amélioration des salaires et des conditions de vie et de travail. Nous devons lutter pour chaque acquis ou progrès social, aussi petit soit-il. Mais nous devons aussi comprendre qu’il ne sera pas possible de satisfaire nos revendications fondamentales tant qu’une oligarchie parasitaire possèdera la terre, les banques et les principales industries.
Dans la lutte contre l’ancien régime, les syndicats se sont liés à d’autres couches de la société : les chômeurs, les femmes, la jeunesse, les paysans et les intellectuels. C’est absolument nécessaire. La classe ouvrière doit se placer à la tête du pays et diriger la lutte contre toutes les formes d’injustice et d’oppression.
Le peuple révolutionnaire établit toutes sortes de comités d’action. C’est une étape nécessaire pour donner au mouvement révolutionnaire une forme cohérente et organisée. Cependant, de tels comités ne doivent pas remplacer les syndicats, qui doivent rester la forme d’organisation fondamentale du mouvement ouvrier.
Les syndicats sont des écoles révolutionnaires. Ils joueront un rôle clé dans le renversement du vieux régime et la construction d’une société nouvelle, socialiste, dans laquelle ils connaîtront un puissant développement. Ils joueront alors un rôle déterminant dans la planification démocratique de l’économie et la direction de la société.
Les syndicats doivent être construits et transformés en d’authentiques organisations de lutte !
Tous les bureaucrates et éléments corrompus doivent être purgés des syndicats !
Pour des syndicats démocratiques : élection et révocabilité de tous les officiels !
Aucun contrôle de l’Etat sur les syndicats ! Ils doivent être contrôlés par les travailleurs !
Pour le contrôle ouvrier de l’industrie ! Pour une planification socialiste et démocratique de la production !
Le rôle de la jeunesse
Le grand révolutionnaire et martyr allemand Karl Liebknecht disait : « La jeunesse est la flamme de la révolution socialiste ». Ces mots peuvent être inscrits sur la bannière de la révolution arabe. La jeunesse a joué un rôle clé à toutes les étapes. Les manifestants qui ont déferlé dans les rues d’Egypte et de Tunisie étaient principalement de jeunes gens privés d’emploi et d’avenir. Certains étaient diplômés, d’autres venaient des bidonvilles.
Dans tous les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du nord, la majorité de la population est jeune. La jeunesse subit les pires effets de la crise du capitalisme. 70 % des moins de 25 ans n’ont pas d’emploi en Tunisie, 75 % en Algérie et 76 % en Egypte. La situation est semblable dans tous les autres pays de la région.
Sans travail, les diplômés n’ont pas la possibilité de se marier et de se loger. Cela souligne l’impasse du capitalisme. Ces pays ont besoin de médecins, de professeurs, d’ingénieurs, mais il n’y a pas d’emploi. Il y a dans la jeunesse un profond sentiment d’injustice et une colère brûlante à l’égard d’un système qui la prive de tout avenir et d’un régime corrompu qui s’engraisse au détriment du peuple.
Le seul espoir de ces jeunes est de combattre pour un changement fondamental de société. Ils ont balayé toute peur et se préparent à se battre pour la liberté et la justice. En Tunisie, la jeunesse révolutionnaire a organisé une marche massive en direction des bureaux du premier ministre, à Tunis. Elle a organisé un campement de masse sur l’esplanade de la Kasbah. Les étudiants ont manifesté en grand nombre pour une Assemblée Constituante et contre le gouvernement de Ghannouchi. La jeunesse a été le catalyseur du mouvement qui a renversé Ghannouchi, fin février. En Egypte, nous observons le même phénomène. Les dirigeants des manifestations sont majoritairement des jeunes sans-emploi et sans avenir.
L’Histoire se répète. En 1917, les Mencheviks accusaient les Bolcheviks de n’être qu’une « bande de gamins », ce qui n’était pas complètement faux. L’âge moyen des militants bolcheviks était très bas. La jeunesse est toujours la première à réagir, car elle n’a pas les préjugés, les peurs et le scepticisme des générations précédentes.
La jeunesse de tous les pays est ouverte aux idées révolutionnaires. Nous devons aller vers la jeunesse ! Si nous nous adressons à elle avec les idées du marxisme révolutionnaire et de l’internationalisme ouvrier, elle nous répondra avec enthousiasme.
Du travail pour tous !
Tous les jeunes doivent avoir un travail ou bénéficier d’études gratuites !
A travail égal, salaire égal !
A bas le harcèlement policier !
Pleins droits démocratiques dès 16 ans, y compris le droit de vote !
Le rôle des femmes
Les masses ont senti leur force collective et n’ont plus peur : c’est le facteur décisif. L’humeur de défiance s’est propagée des éléments les plus énergiques, les plus jeunes et les plus déterminés vers des couches plus inertes et plus prudentes de la population.
La participation active des femmes est l’un des aspects les plus enthousiasmants des révolutions en Egypte et en Tunisie. La vieille soumission disparaît. A Alexandrie, des femmes âgées jetaient de la vaisselle sur la police depuis les balcons de leur appartement. Sur les manifestations, de jeunes étudiantes en jeans luttaient aux côtés des femmes portant le hijab. Ces dernières années, déjà, les travailleuses du textile avaient joué un rôle clé dans les grèves massives de Mahalla al Kubra, qui ont préparé le soulèvement révolutionnaire.
Les femmes ont toujours été à l’avant-garde des révolutions. Ces femmes du Bahreïn manifestant sans crainte, certaines voilées, d’autres non, sont une image saisissante de la révolution en action. Elles prolongent la tradition des femmes héroïques de Paris, en 1789, et de Petrograd en 1917.
Le réveil politique des femmes est le signe sûr d’une révolution. La société ne peut pas avancer et prospérer tant que les femmes sont enchaînées. Ce n’est pas un hasard si les réactionnaires, en Egypte, ont attaqué la manifestation du 8 mars, place Tahrir. La révolution arabe recrutera ses combattants les plus courageux parmi les femmes. La complète émancipation des femmes est le premier devoir de la révolution. La place des femmes n’est pas la cuisine, mais la rue, aux côtés des hommes. Elles sont les plus téméraires et elles ont beaucoup à gagner.
A bas la discrimination et l’inégalité !
Complète égalité économique, politique et sociale !
Contre toutes les lois qui entérinent les discriminations !
Les travailleuses doivent être organisées dans des syndicats libres et démocratiques, indépendants de l’Etat !
A travail égal, salaire égal !