De la démagogie à l’état pur
Ce document expose les craintes alarmistes de la bourgeoisie québécoise et exprime le pessimisme de la classe dirigeante qui ne voit aucune issue à la situation actuelle. Le document commence en précisant que lorsque, «…notre avenir est menacé par le déclin démographique et la concurrence mondiale, le Québec ne peut se permettre d’être la république du statu quo. Nous sommes inquiets. Inquiets pour le Québec que nous aimons. Inquiets pour notre peuple qui a survécu contre vents et marées, mais qui ne semble pas conscient des écueils qui menacent aujourd’hui son avenir. »
Malgré le fait que le document se présente comme tel, il n’est en aucun cas une vision lucide du Québec. L’auteur ne prête guère attention aux distictions de classes et parle du Québec comme d’une masse homogène. Les interets du patronat et des grandes entreprises sont présentés comme ceux de tous les Québécois. Incroyablement, le manifeste prend à partie la direction syndicale pour sa protection «à courte vue des intérêts de ses membres », tandis que ceux qui en sont les auteurs ne mentionnent pas qu’ils sont eux-mêmes un rassemblement de PDGs, d’avocats, d’ex-ministres, et de recteurs et professeurs d’université, et que leur document n’ a pour but que la défense de leurs propres interets, ou plutôt, les intérêts de la classe dirigeante, dont la plupart d’entre-eux font partie. Naturellemnt, les intérêts de classe ouvrière ne sont pas seulement différents de ceux de la classe dominante, ils en sont l’inverse.
Cependant, le manifeste expose certains des véritables problèmes du Québec. Lorsqu’il en vient aux conditions de vie, le Québec se trouve parmi les 25% les moins riches des provinces du Canada et des États Unis. La province est considérablement surendebtée. Sa dette par personne est la plus élévée de toute l’Amérique du Nord.
Le manifeste avertit aussi du fait que le Québec fait face à un déclin démographique supérieur à celui de tout les autres pays industrialisés à l’exception du Japon. Ceci fera pression sur les services sociaux et le Québec se retrouvera « entourés par près de 1,2 milliard de personnes, parlant pour la plupart anglais et/ou espagnol. » Dans tout le document règne la crainte de la disparition du Québec. C’est elle qui est supposée convaincre tous les Québécois de la necessité d’endurer les durs remèdes que la bourgeoisie s’apprête a distribuer. Ceci n’est rien de plus que de l’alarmisme cherchant effrayer la classe ouvrière pour ainsi la pousser vers la collaboration.
L’économie québécoise a aussi été durement atteinte par la compétition accrue venue de la Chine et de l’Inde. On nous explique que tandis que la production industrielle de l’Asie a augmenté de 50% depuis l’an 2000, celle du Canada et des États Unis se trouve en stagnation. Le nombre d’emplois dans l’industrie québécoise du textile a chuté de 40%. Et ce n’est pas tout. Ce ne sont pas uniquement les emplois à bas salaires qui sont entrain de déserter le Québec pour l’Asie, mais également ceux dans le secteur informatique. En plus, la croissance réelle du PIB québécois chutera de 50% au cours de la décennie avenir.
En voyant tous ces problèmes apparaitre à l’horizon, la bourgeoisie québécoise ne peut plus se permettre de maintenir le « modèle québécois », ce système keynésien du déficit budgétaire qui a jusquà présent financé le puissant état-providence dont jouit encore plus ou moins la province. Naturellement, le manifeste prétend partager « avec conviction » le modèle québécois qui se fonde sur la « solidarité sociale », mais les gens ne sont pas dupes, ils savent qu’il n’est guère possible de démanteler le modèle québécois et de le préserver en ce faisant. La bourgeoisie québécoise nous avertit, elle nous donne du temps pour préparer la bataille a venir.
Les Solutions
La bourgeoisie québécoise cherche désespérément une issue à la situation actuelle. Il fait des années maintenat que l’économie québécoise connait un déclin lent et continu. Les patrons adoreraient pouvoir faire ce que font déjà leurs homologues du reste du Canada. Ils aimeraient pouvoir réduire des services publics tels que les soins médicaux et les allocations de chomage, il voudraient avoir la possibilité de s’attaquer à l’ état-providence et privatiser les entreprises d’utilité publique. En réalité, ils veulent démanteler l’état-providence pour ainsi pouvoir piller les fonds de la province. Ceci signifie que le poids de la crise économique serait exclusivement supporté par la classe ouvrière.
La classe ouvrière n’acceptera pas cela. La lutte de classes à toujours été d’actualité au Québec. Ce sont les traditions militantes de la classe ouvrière Québécoise qui ont empeché les patrons d’agir comme bon leur semble. Naturellement, un affaiblissement progressif de la dépense publique ainsi que des attaques contre les salaires et les conditions de travail ont eu lieu aussi bien sous les gouvernements PQ que sous ceux des libéraux. Néanmoins, les patrons Québécois n’ont pas pu lancer une attaque frontale (comme l’ont fait leurs homologues de la Colombie Britannique, dans la province d’Alberta et dans l’Ontario, pour ne citer que quelques exemples) par peur de la réaction de la classe ouvrière. Lucien Bouchard a lui-même été l’organisateur de plusieurs réductions de salaires ainsi que de l’affaiblissement de l’état-providence. Cherchant désespérément à contrôler la dette de la province, il réduisit les indemnités de chômage et s’attaqua ensuite aux salaires des infirmières et aux dépenses médicales. À chaque nouveau carrefour, les attaques patronales se sont heurtées à une forte et militante opposition de la classe ouvrière et des syndicats. Les patrons on dû, soit faire marche arrière, soit se contenter d’un compromis, sans jamais vraiment obtenir ce qu’ils souhaitaient.
Le document déplore également que le Québec soit moins productif que le reste de l’Amérique du Nord et se plein en disant que « les Québécois travaillent moins que les autres Nord-Américains; ils prennent leur retraite plus tôt; ils se paient des programmes sociaux plus généreux… ». Ceci n’est rien de moins qu’une déclaration de la fin de ce modèle, la classe bourgeoise prépare une offensive sans précédant contre les droits et les acquis de la classe ouvrière. Néanmoins ces droits ont été obtenus par la classe ouvrière après des années de lutte, et elle n’est pas prêteà y renoncer sans se battre.
Et ce manifeste, que recommande-t-il au juste ? Le manifeste sonne l’alarme face au vieillissement de la population et de l’augmention des couts médicaux (c-à-d. celle de la réduction du budget destiné au soins). Il explique que la dette doit etre payée ( c-à-d. le fait que les dépenses seront réduites pour que l’argent soit utilisé pour le paiement de la dette).
Incroyablement, lorsque seulement six mois se sont écoulés depuis la grève massive des étudiants du Québec, le manifeste fait appel à l’annulation des frais d’inscription et demande la mise en place d’un nouveau système de bourses d’étude. Ces mesures seraient favorables pour les étudiants, qui, nous explique-t-on, font face a une « détérioration de la qualité de l’enseignement et de la recherche universitaires » qui est le résultat d’une réduction budgétaire de 375 millions de dollars canadiens. Le manifeste nous explique qu’au cours de cette dernière décennie, la stagnation des frais d’inscription a entrainé une perte 3 milliards de dollars ce qui n’aurait pas eu lieu si l’on avait permis aux tarifs d’inscription de suivre l’évolution générale des prix du reste du Canada. Or, l’éducation est un droit, un droit pour lequel les ouvriers et les étudiants du Québec sont prêts à se battre. Il n’y a qu’a regarder la grève étudiante mentionée ci-dessus pour le constater.
Le manifeste explique que puisque « Comme les Québécois seront moins nombreux, il leur faudra être plus productifs. À une main-d’oeuvre de qualité devra donc s’ajouter un environnement de travail favorisant la performance et l’innovation. […] Il nous faut aussi être innovateur en matière d’organisation de travail, même si cela exige la remise en question de certains acquis. La concurrence mondiale étant ce qu’elle est, il serait suicidaire de refuser de se défaire des rigidités qui minent notre compétitivité. » C-à-d : La classe ouvrière devra accepter les baisses de salaires et la détérioration des conditions de travail, faute de quoi les entreprises feront leurs valises et partiront.
Le manifeste appel aussi à une restructuration des couts de l’éléctricité. Hydro-Québec est une société d’état qui fournit de l’éléctricité bon-marché au Québécois. Contrairement à d’autres entreprises d’utilité publique Canadiennes, celle-ci n’a pas été privatisée et n’a pas été contrainte d’ajuster ses taux à ceux du marché. Les bourgeois en ont eu assez. Les bourgeois du Québec se sont rendu compte qu’Hydro-Québec pourrait leur rapporter autant que le pétrole le fait aux patrons de la province d’Alberta. Cyniquement, le manifeste prétend que « Contrairement à une perception répandue, elle profite davantage aux personnes à revenus élevés (qui auraient les moyens de payer plus) qu’aux personnes moins aisées (qu’on peut protéger contre les augmentations de tarifs). Le président du Mouvement Desjardins, M. Alban D’Amours, a déjà proposé que les tarifs d’électricité soient augmentés et qu’une part déterminée des profits d’Hydro-Québec soit consacrée au remboursement de la dette du gouvernement du Québec. Nous endossons cette proposition, en précisant qu’à notre avis, la hausse des tarifs d’électricité devrait être à la fois substantielle et progressive. » Il nous semble évident que si ces changements étaient réalisés leurs conséquences s’abattraient avant tout sur la classe ouvrière. À un certain moment , le gouvernement provincial proposera la privatisation d’Hydro-Québec. Les tariffs d’utilisation augmenteront, comme ils l’ont fait de part le pays, et se sera la classe ouvrière et les pauvres qui devront en subir les conséquences.
Le document demande aussi une augmentation de la privatisation et que l’économie accorde un rôle plus important au secteur privé. « Il faudrait aussi se défaire de la méfiance malsaine qui s’est développée dans certains milieux à l’égard du secteur privé.[…] Si un pays aussi social-démocrate que la France a recours au privé pour financer la construction de ses infrastructures, on voit mal selon quelle logique le Québec se priverait de faire de même. Ouvrir la porte au privé dans certains secteurs ne signifie pas l’abandon du modèle québécois. » Ce n’est ni le moment ni l’endroit de discuter la nature sociale-démocrate de l’Etat Français, il suffit de préciser que les patrons français ont déclanché une attaque frontale contre la classe ouvrière. La semaine de 35 heures, tous les services publics, sont en danger et que la France a été ébranlée par une série de grandes grèves ces derniers mois. Si la France a maintenu publics certains secteurs (tels que l’éléctricité), ce n’est pas au profit du peuple de France, ni par considération pour quelques principes sociaux démocratiques que ce soit, mais pour le bien de la classe dirigeante qui cherche désespérément a défendre ses ressources et ses bénéfices contre les incursions de concurrents tels que l’Allemagne ou le Royaume-Uni.
Le message est clair, les bourgeois québécois cherchent désespérément à ouvrir le capital des entreprises publiques et à introduire des privatisations répandues. Les bourgeois salivent à l’idée des bénéfices potentiels qui pourraient etre obtenus en pillant les valves provinciales.
La véritable signification du message transmis par le manifeste Pour Un Québec lucide est évidente. Les dirigeant libéral québécois Jean Charest à assaillit le document en expliquant qu’il était tel de «la musique à mes oreilles. » Les libéraux ont même ajourné une session a l’Assemblée Nationale et ont annoncé que des discussions seront ouvertes concernant les document. Pour un Québec lucide est l’ébauche du programme de la bourgeoisie, et représente exactement se qu’a essayé d’établir Charest depuis son arrivée au pouvoir. Demeure le problème que ce gouvernement ait été trop faible pour faire passer ces mesures et a fait face à de grandes grèves et à des manifestations massives l’ayant forcé à faire marche arrière. Lucien Bouchard est entré sur scène pour appaiser l’opinion publique et faire un appel démagogique au nationalisme dans une tentative de donner de la force et de la crédibilité aux libéraux et encourager ces derniers à continuer leurs attaques.
Les travailleurs du Québec n’ont qu’à regarder le reste du Canada pour voir le sort qui leur est réservé. De grandes grèves militantes ont eu lieu en Terre-Neuve et en Colombie Britannique. Ces grèves étaient déstinées à défendre les emplois et les salaires et contre les privatisations et l’affaiblissement des services publics. Les patrons du reste du Canada sont sur l’offensive (depuis des années d’ailleurs) et ceux du Québec s’y préparent.
Dans le passé les patrons Québécois pouvaient se payer des réformes sur la base du boom économique de l’après-guerre. Ils ont développé à contre-coeur l’état-providence et le « modèle québécois » sous pression du mouvement ouvrier et de ses importantes luttes. Mais cette époque est désormais révolue. La crise du capitalisme signifie que les patrons ne peuvent guère plus se permettre de maintenir les réformes acquises au cours de cinquante dernieres années de lutte. Maintenant nous avons les contre-réformes et le démantèlement de tout ce que nous avons obtenu dans le passé. D’autre part la classe ouvrière ne peut plus permettre d’autres détériorations. C’est la recette d’une explosion de la lutte de classes, non seulement au Québec, mais partout.
Les Syndicats
Comme nous l’avons déjà dit, le manifeste dirige un coup dur contre les syndicats. Les syndicats sont très forts au Québec. Surtout dans le secteur public, précisément celui que les patrons s’apprêtent à attaquer. Le manifeste adresse un clair avertissement à la direction syndicale du Québec :
Pour que la concertation que suppose notre modèle soit productive, il faut qu’il y ait des constats communs, un dialogue véritable, une prise en charge collective des responsabilités. Faut-il comprendre de la réaction des représentants syndicaux au rapport du Comité Ménard sur la pérennité des services de santé que cette concertation sera de plus en plus difficile? Nous souhaitons que cette réaction soit conjoncturelle, liée aux négociations en cours dans le secteur public, et n’exprime pas une culture plus profonde. En effet, il ne faudrait pas que le syndicalisme québécois s’éloigne du modèle responsable et coopératif qui l’a caractérisé au cours des deux dernières décennies. Tous se souviennent de l’ouverture et du leadership manifestés par les dirigeants syndicaux lorsque, d’un commun accord avec le monde des affaires et l’ensemble de la classe politique, ils ont donné en 1996 un appui indéfectible à l’atteinte du déficit zéro. Aujourd’hui comme à cette époque, tous les Québécois sont interpellés par les mêmes défis. Nous ne parviendrons à les relever que si nous y travaillons ensemble.
Ceci se résume à un message avertissant les syndicats de ne pas abandoner le modèle de « consensus » et de « paix sociale » caractéristique des syndicats québécois depuis les années soixante-dix. Prétendre que tout les « Québécois font face aux mêmes problèmes » est tout simplement faux. Les difficultés auquelles fait face la classe ouvrière sont complètement différentes de celles des patrons. Les trente glorieuses ont ouvert la voie au succès du réformisme. Les dirigeants syndicaux étaient co-optés pour assister l’état dans la construction du modèle québécois. Les intérêts de classe ouvrière furent mélés à ceux de la nation et de la classe dirigeante. Aujourd’hui ce n’est pas le cas. La formule suggérant qu’ « Il ne faudrait pas que le syndicalisme québécois s’éloigne du modèle responsable et coopératif qui l’a caractérisé au cours des deux dernières décennies. » avertit les dirigeants syndicaux de ne pas se méler aux batailles a venir, d’encadrer leurs bases et de poursuivre leur politique de collaboration de classe.
« À l’heure actuelle, le discours social québécois est dominé par des groupes de pression de toutes sortes, dont les grands syndicats, qui ont monopolisé le label « progressiste » pour mieux s’opposer aux changements qu’impose la nouvelle donne. » Il est vrai que les directions syndicales québécoises ont résisté au changement, changement provenant des deux cotés. La nouvelle situation leur est très incomfortable. Au cours des des deux dernières les bases de la FTQ et de la CSN ont accumulé la pression pour une grève générale contre le gouvernement, les privatisations et l’austérité. Les dirigeants syndicaux ont résisté à cette pression et ont donc canalisé ce mouvement vers des chemins plus tranquilles. Les directions syndicales se rapellent avec nostaligie des jours du consensus et du partenariat social. La pression venue de la base force les dirigeants syndicaux à résister aux attaques des patrons,même si n’est que par des discours et des demi-mesures et en laissant l’action de coté. Ces derniers craignent aussi la radicalisation de la classe ouvrière et agissent afin de résister à la pression des masses. Ceci a résulté en l’accumulation des compromis éloignant de plus en plus vers le futur le grand face à face. Mais l’heure viendra ou ceux qui se trouvent en travers de la route se feront écraser. La classe ouvrière du Québec s’attend à ce que ses dirigeants réprésentent les intérets de ceux qui les ont élus leurs et non ceux du marché. Ceux qui manquent à cela seront rejetés du mouvement pour etre remplacés par ceux qui sont prêts à se battre.
Une leçon d’histoire
Pour un Québec lucide manque d’une vision lucide de l’histoire du Québec. Ceux qui maitrisent le passé maitrisent le futur. Les bourgeois du Québec ont eu le monopole de l’histoire de la province et il semble qu’ils ont tellement répété les mensonges à son sujet qu’ils y ont fini par y croire à leur tour !
Les références à la Grande Noirceur, au Refus Global et à la Révolution tranquille dans le manifeste ne sont pas faites par accident. Bouchard et cie. éspèrent que l’on se souviendra de leur manifeste comme de premier coup de fusil à avoir retenti dans une nouvelle (contre-) Révolution tranquille. Des journalistes Anglophones incultes essaient de nous dire que Pour un Québec lucide est le Refus Global du 21ième siècle.
Faute d’idées propres et d’une vision lucide, les bourgeois doivent co-opter l’histoire pour la tourner en leur faveur et l’utiliser à leurs propres fins. Il leur importe donc peu que Refus Global soit un texte authentiquement révolutionnaire, considéré comme l’un des plus importants écrits sociaux de l’histoire du Québec. Refus Global fut publié en 1948 par Paul-Émile Borduas et un groupe d’artistes révolutionaires connus sous le nom d’ « Automatistes ». Historiquement, le document est considéré comme le premier coup de fusil de la Révolution tranquille qui, en exprimant la colère agitée qui s’accumulait au sein de la société québécoise, symbolisait les aspirations révolutionnaires des Québécois.
En ce qui concerne Pour un Québec lucide, il reflète le pessimisme ainsi que le manque de vision de la bourgeoisie. Ce manque d’originalité de la part de Bouchard et cie. symbolise la décadence et le déclin de la bougeoisie au Québec. Maintenant, à l’inverse du passé dans lequel la bourgeoisie de par le monde, sur la base de l’essort économique de l’apès-guerre, était pleine d’optimisme et de visions et faisait des plans prévus pour durer des décennies, la bourgeoisie ne voit à l’horizon que la damnation, la misère et les catastrophes du futur, et, plutôt que de prévoir des décennies de croissance, elle se prépare pour les batailles imminentes de la lutte de classes.
Le manifeste de Bouchard fait ouvertement appel à une nouvelle Révolution tranquille : « Les défis des années 1960 exigeaient une révolution tranquille non seulement de nos institutions, mais aussi de notre façon de voir les choses, de notre culture; il en est de même aujourd’hui. Cet esprit nouveau sera lucide, responsable, et libre. Il accueillera avec ouverture les idées originales, plutôt que d’excommunier sur le champ ceux qui les proposent. Animés de cet esprit nouveau, les Québécois feront face à leurs problèmes, plutôt que de s’en prendre aux autres et se contenter de faux-fuyants.[…] Plus nous seront nombreux à appeler au réveil de nos concitoyens, plus il y a de chances qu’ils nous entendent. Alors, comme tant d’autres fois depuis leur arrivée en Amérique, les Québécois prendront leur sort en main. Et ils réussiront. »
La bougeoisie Québécoise devrait faire attention à ce qu’elle souhaite. Les bourgeois ne préfèrent se souvenir que de la « Révolution tranquille », des années entre 1960 et 1966 marquées par un calme relatif dans la période qui devait etre reconnue comme la Révolution Québécoise. Ils préfèreraient oublier le reste et ont en effet crée un mythe en espérant que personne ne s’en souviendrait. Ils essaient de présenter la Révolution tranquille comme le mouvement de tous les Québécois, aussi bien celui des patrons, que celui des ouvriers et paysans et des ministres du gouvernement qui se battaient pour atteindre des objectifs communs. Rien ne pourrait etre plus éloigné de la vérité !
La Révolution Québécoise a ses origines dans la publication du Refus Global , la grève des mineurs de l’amiante de 1949,les grèves de Louisville et de Dupuis Frères de 1952, l’émeute Maurice Richard en 1955 et la grève de Murdochville en 1957. Ces grèves symbolisaient l’éveil de la classe ouvrière, de l’éveil national, et commencaient à défiaient le règne de Duplessis, la domination des patrons Anglophones et Américains ainsi que l’emprise de l’impérialisme.
La victoire électorale de Jean Lesage en 1960 suite à la mort de Duplessis ota l’élan de la classe ouvrière et le placa dans les mains de petite bourgeoise québécquoise en ascension. Les bourgeois cherchaient désespérément a faire dérailler le mouvement ouvrier qui était en train de se développer, et avaient pour intention de co-opter les syndicats et la classe ouvrière pour empecher le mouvement d’aller plus loin.
Dans une variante unique de la révolution permanente les petits bourgeois du Québec ont put se servir de l’état et d’une série de nationalisations afin de développer une classe bourgeoise Francophone. Ils s’attaquèrent à la domination de l’impérialisme Canadien-Anglais et Américain et créèrent leur propre niche, mais sans plus. Les syndicats furent embarqués et un nouveau projet de construction nationale fut lancé. La société Québécoise se sécularisa rapidement et l’état-providence fut bati. Le système scolaire a été entièrement révisé et modernisé, les fonctionaires publics se syndicalisèrent et en général les syndicats grandirent. Au Québec ces réformes furent progressives et importantes, mais ce ne fut qu’une question de temps avant que les contradictions de classe ne viennent diviser le mouvement. Il était inévitable que la bourgeoisie Francophone naissente veuille modérer les réformes tandis que les travailleurs voulaient les approfondir.
Naturellement le débat entre universitaires et historiens concernant la date exacte de l’aboutissement de la Révolution tranquille persiste. Certains disent que ce fut en 1966 avec la victoire de l’Union Nationale, d’autres préfèrent la terminer juste avant la crise de 1970. La victoire de l’Union Nationale représente la réaction à la révolution. Les bourgeois et les impérialistes, soutenus par le vote rural, sentaient que les réformes étaient allées suffisament loin et ne souhaitaient pas les approfondir davantage. Vers le milieu des années soixante la CSN (Confédrération des Syndicats Nationaux) a émergé des vieux Syndicats Catholiques. Les vieux syndicats réactionnaires, depuis longtemps l’outil par lequel les patrons controlaient la classe ouvrière, se transformèrent rapidement en l’un des syndicats les plus puissants et radicaux de l’histoire du continent. Sous la direction de la CSN les luttes de la classe ouvrière ont dévelopé un caractère anti-capitaliste et anti-impérialiste. L’idéologie officielle de la CSN était l’anarcho-syndicalisme et les syndicats commencèrent a defier le pouvoir du capitalisme et de l’impérialisme.
À partir du milieu des années soixante, la révolution Québécoise fut marquée par des actes de terrorisme individuel ainsi que par une série de grèves militantes telles que celle des « boys » de La Palme, celle des taxis et celle de La Presse. Celles-cies culminèrent lors de la grève générale quasi-insurrectionelle de 1972.
Malheuserement nous n’avons dans cet article ni le temps ni la place pour passer en revue toute l’histoire du mouvement ouvrier québécois. Il sera suffisant de remarquer que ce fut la défaite de la classe ouvrière lors de la grève générale de 1972 qui fit le lit de la monté du Parti Québécois et de l’ère de la « paix sociale » et du « partenariat social » ainsi que du consensus sur lequel se fonde le modèle québécois. Tout comme le dévelopment du mouvement ouvrier des années soixante et du début des années soixante-dix était le dévelopment à un stade plus élevé de celui des années cinquante, la victoire éléctorale du PQ était un dévelopment a un niveau plus élevé de la Révolution tranquille (ou des années Jean Lesage). Le PQ a mené à bien ce qu’avait tenté de faire le gouvernement Lesage en liant les intérêts de la classe ouvrière avec ceux de l’état et de la classe dirigeante par le biais des directions syndicales. Jusqu’à la grève générale de 1972 le CSN avait qualifié le PQ de « petite bougeoisie professionelle et technocratique dont l’ambition était de remplacer la bourgeoisie Anglo-Canadienne au Québec (en particulier a travers les institutions de l’état) ». Ce qui fut d’ailleurs précisement le cas. Pendant les mois tourmentés qui ont précédés la grève générale, Michel Chartrand (alors dirigeant de la CSN) lui-même dénonca le PQ en disant que « se sont eux les gens qui veulent un mouvement syndical institutionalisé intergré au sein du système capitaliste. Nous n’avons pas besoins que des gugusses de ce genre nous disent ce que nous devrions faire. »
Malheuresement ce fut exactement ce qui s’est passé. Les nationalistes petits-bourgeois du PQ sont arrivés au pouvoir en 1976 et ont invité les syndicats vaincus et demoralisés (par les actions de leurs directions) à les rejoindre dans un nouveau projet de construction nationale. Les syndicats furent institutionalisés et intégrés au sein su système capitaliste. Les intérêts de la classe ouvrière furent jetés à l’eau dans l’intérêt des patrons et de la « nation ». C’est sous le PQ, qui depuis cette époque a dominé la politique québécoise, que la bourgeoisie Anglo-Canadienne fut remplacée au Québec. Ce fut la gestion de l’état qui financa et paya pour la montée des petit-bougeois québécois et créa la couche de nouvelles élites politiques et financières du Québec.
La Contre-Révolution de Bouchard
En réalité Bouchard fait appel à une (contre-)Révolution tranquille contre tous les acquis du passé. Il appelle à ce qur l’on altère fondamentalement le modèle québécois qui a été bati au long des trentes dernières années. C’est pour cela que le PQ a été horrifié par Pour un Québec lucide. Le manifeste cherche à miner le mensonge de la « solidarité sociale » au Québec. Mais Bouchard et cie. n’ont fait que reconnaitre la réalité de la situation, que le statut quo ne peut plus etre maintenu. La base du réformisme et la « paix sociale » qui caractérisait le PQ et sa relation avec les syndicats a disparu.
Mais il vaudrait mieux pour eux qu’ils fassent attention. Les traditions de la classe ouvrière au Québec sont vibrantes et militantes et étant donné les batailles qui se préparent, la bougeoisie, Bouchard et cie. risquent de recevoir plus que ce qu’ils cherchaient. Les ouvriers du Québec retourneront vers les traditions des années soixante et du début des années soixante-dix et réapprendront les leçons du passé. Les 10 Novembre les premiers coups ont été tirés par le secteur public lorsque celui-ci a organisé une série de grèves. Pour vaincre, la classe ouvrière doit reprendre ses traditions de lutte révolutionnaire en les arrachant des mains du PQ et de celles Bouchard et de ses semblables et se battre pour la véritable solidarité sociale donc pour le socialisme . Les syndicats doivent rompre avec le PQ et la petite-bourgeoisie du Québec et doivent lutter pour les intérets de la classe ouvrière.
Encore une fois : la question nationale
Possiblement, l’un des points les plus intéressants soulevés par ce manifeste était celui concernanmt la souveraineté. « Autre solution mise de l’avant : la souveraineté du Québec. Certains membres de notre groupe sont favorables à la souveraineté, d’autres pensent que l’avenir du Québec sera mieux assuré au sein du Canada. Les uns estiment leur option préférable à celle des autres mais nous avons tous la certitude que quel que soit le choix des Québécois, les défis qui confrontent le Québec resteront entiers. »
Ceci est un coup dévastateur porté vers le PQ et tous les nationalistes qui ont prétendu pendant des années que la solution de tous les problèmes du Québec serait la souveraineté. Ce petit paragraphe est très révélateur. Il démontre que les liens de classe sont plus forts que ceux de la nationalité. Mainte fois la classe ouvrière du Québec a été trahie par les intérêts de la « nation ». Ceci démontre que la classe dirigeante est disposée à mettre de coté ses différences afin de s’unir autour d’une politique de classe. Ce qu signifie cette phrase est que quoique décident les Québécois en ce qui concerne la question de la souveraineté, ces problèmes demeureront et que de point de vue de la classe dirtigeante la solution reste la même : une attaque frontale contre les acquis de la classe ouvrière.
Ceci est une leçon importante pour la classe ouvrière du Québec. Les travailleurs a aussi doivent mettre de coté leurs différences, non seulement d’opinion, mais également de language et d’éthnicité et s’unir d’une politique de classe. Les marxistes ont toujours expliqué que la meilleure façon pour la classe ouvrière du Québec d’aller de l’avant est l’unité de classe aussi bien entre eux qu’avec les ouvriers de tout le Canada pour lutter contre l’enemi commun : la classe dirigeante et le système capitaliste. La classe ouvrière et les syndicats doivent briser quelles que soient les connections avec le modèle québécois. C’est un vestige du passé et même la nostalgie la plus violente ne pourra le ramener à la vie. Tandis que les directions syndicales se tournent vers le passé, les patrons vont de l’avant et se préparent à lancer l’offensive. Il n’est pas difficile d’imaginer quelle équipe sera écrasée contre les planches lorsque l’une joue au curling et l’autre au hockey. La collaboration de classes et la paix sociale sont des vestiges du passé et le statut quo ne peut plus etre maintenu. Ce qui est vrai en termes de stratégie syndicale l’est également en terme de stratégie politique. Les syndicats doivent rompre avec les petis-bourgeois du PQ et doivent créer un parti du travail indépendant, un parti qui luttera pour les intérêts de toutes les couches de la classe ouvrière.
Lénine a expliqué que dans le fond la question nationale est une question de pain. Les ouvriers de par le Canada, de la Colombie Britannique au Québec passant par la Terre-Neuve, sont confrontés aux mêmes problèmes. Tout les Québécois ne font pas face aux mêmes difficultés, mais les travailleurs de par le continent si. Ils font face à l’austérité, les suppressions d’emplois, les privatisations, au chômage, aux réductions de salaires, à la détérioration des conditions de travail et à un manque de logements adéquats. C’est cela qui uni la classe ouvrière. Les liens de classe sont enracinés en profondeur. Les solutions aux problèmes du Québec ne se trouvent ni dans Pour un Québec lucide ni dans une république capitaliste indépendente. Ça ne ferait qu’isoler encore davantage les travailleurs du Québec de ceux du reste du continent et les rendrait encore plus vulnérables au genre de « solutions » que les bourgeois savent nécessaires que Québec soit indépendent ou demeure au sein du Canada. C’est sur cette base que la lutte de classes passera à travers la lutte nationale au Québec.
Les solutions des problèmes au Québec se trouvent dans la lutte unifiée contre le capitalisme, dans la lutte unifiée pour le socialisme. Les difficultés auxquelles fait face la classe ouvrière se trouvent dans la création d’une fédération socialiste. Nous faisons appel à une société ou les resources sont rationellement et scientifiquement planifiées pour répondre aux besoins et aux désirs de tout le monde et où le peuple du Québec sera libre de déterminer son futur et de construire une culture vive et vibrante. Au lieu de la faillite d’un retour vers le salariat proposé par Bouchard, nous appelons à l’unité de tous les travailleurs dans la lutte pour le socialisme.