Cet article a d’abord été publié en février dernier dans Le Communiste, le journal de la section suisse de la Tendance marxiste internationale. Nous avons décidé de le reproduire ici, car il contient tous les points théoriques fondamentaux sur le rôle du journal communiste. Tel qu’expliqué, le journal, c’est « le parti dans ton sac à dos ». Notre journal, Révolution communiste, se veut cet outil que tous les communistes peuvent utiliser ici pour bâtir le Parti communiste révolutionnaire. Au travail!
Quand nous allons fonder le Parti révolutionnaire communiste en mai de cette année, nous ne partirons pas de zéro. Nous perpétuons une tradition longue et riche qui a ses racines dans le Manifeste du Parti communiste.
Lénine est une figure éminente de cette riche tradition. Celui-ci a été capable de mettre en œuvre les idées de Marx et Engels. Débutant avec une poignée de marxistes, il réussit à construire un parti révolutionnaire après des années de travail ardu et patient. Ce parti, les bolchéviks, gagna des millions de travailleurs et de paysans pour le programme communiste. C’est ce parti qui mena la classe ouvrière russe à une révolution victorieuse. Elle rompit avec le capitalisme et montra la perspective d’une révolution mondiale aux masses opprimées dans le monde entier. C’est sur cette tradition que nous nous appuyons.
Que faire?
La fondation du PCR est une déclaration de guerre contre l’isolement des révolutionnaires. Cette déclaration s’adresse aussi bien au réformisme et aux illusions pessimistes selon lesquelles rien ne peut être fait contre un système tout-puissant. Lénine a clairement démontré comment cette fragmentation peut être vaincue et comment le parti de masse révolutionnaire peut être construit.
Dans ce but, il posa les fondations du parti dans les années 1900 – 1903. Le Parti ouvrier social-démocrate de Russie fut fondé en 1898 sous une bannière résolument révolutionnaire et communiste. Mais Lénine constata que l’apparition de tendances réformistes, la fragmentation organisationnelle et l’amateurisme étaient des freins au mouvement ouvrier. Il manquait un plan commun pour la pratique.
En 1900, il lança le journal Iskra (« L’étincelle »), et en 1902, écrit un livre polémique d’une importance capitale, Que faire?. C’était une déclaration de guerre contre ces tendances qui paralysaient la force de frappe des révolutionnaires qui avaient pourtant une motivation sans bornes – comme c’est encore le cas aujourd’hui. Le texte appelait aussi à se réunir dans un parti révolutionnaire, discipliné et centralisé :
« Il faut d’abord développer une unité idéologique forte et ainsi se débarrasser de la confusion et du désordre. Cette unité idéologique doit être amarrée par le programme du parti. »
Lénine, Annonce de la rédaction de l’Iskra, 1900
Le programme révolutionnaire
Lénine ne priorisait jamais les questions organisationnelles. Le parti révolutionnaire est avant tout des idées et un programme. De ceux-ci découlent la manière de s’organiser, et celle de Lénine fut toujours caractérisée par une grande flexibilité.
Toute sa vie il lutta contre l’adaptation réformiste au système existant et pour un programme révolutionnaire conséquent. Dans la phase qui donna naissance à Que faire?, le réformisme russe existait sous la forme de « l’économisme ».
Les économistes réduisaient leur programme aux revendications quotidiennes « syndicales » immédiates, notamment pour des améliorations sur le lieu de travail. Ils affirmaient que les travailleurs ne s’intéressent qu’aux questions « concrètes » de leurs conditions de vie, et pas aux idéaux révolutionnaires ou à là théorie.
Lénine lutta avec véhémence contre cette conception, car elle n’avait comme conclusion rien d’autre que l’abandon du programme de la révolution et la focalisation sur les tâches immédiates, prétendument plus faciles.
Les marxistes lutteront toujours pour des réformes aptes à améliorer les conditions de vie des travailleurs. Mais « [le parti révolutionnaire] subordonne la lutte pour les réformes, comme la partie au tout, à la lutte révolutionnaire pour la liberté et le socialisme. »
Aucun problème des ouvriers et des opprimés ne peut être résolu tant qu’une minuscule élite exploitatrice tient entre ses mains le pouvoir politique et économique. Ainsi, le parti « dirige la lutte de la classe ouvrière, non seulement pour obtenir des conditions avantageuses dans la vente de la force de travail, mais aussi pour la suppression de l’ordre social qui oblige les non-possédants à se vendre aux riches. »
La classe ouvrière a besoin d’un programme révolutionnaire. C’est uniquement la lutte unie pour un tel programme qui peut amener à la conclusion que la classe elle-même doit prendre le pouvoir et exproprier les capitalistes. Pour y arriver, une indépendance politique et organisationnelle totale de la bourgeoisie est nécessaire, car les intérêts des ouvriers et des bourgeois sont diamétralement opposés.
Le rôle du parti
Les économistes disaient que les ouvriers ne s’intéressent pas aux grandes questions de la politique et de la révolution. Se voulant « prolétaires » et « proches des travailleurs », ils démontraient en vérité leur profond mépris d’intellectuels petits-bourgeois envers les ouvriers.
Les ouvriers ne sont pas des idiots! Personne ne doit leur expliquer que leurs conditions au travail sont mauvaises; pour cela, le parti n’est pas nécessaire. Ce qu’il leur faut, c’est une explication juste du lien avec le système entier et une proposition claire pour avancer.
Loin d’idéaliser la classe ouvrière, les marxistes savent très bien que les masses des travailleurs n’ont pas de conscience révolutionnaire la plupart du temps. La conscience est conservatrice. Le quotidien et l’influence paralysante et atomisante de l’idéologie bourgeoise pèsent lourdement sur les têtes des travailleurs.
Par contre, Lénine et tous les vrais marxistes à ses côtés ont toujours eu la plus grande confiance en la classe ouvrière et son potentiel révolutionnaire. Il savait que des expériences pénibles sous le capitalisme allaient tôt ou tard les pousser vers des conclusions révolutionnaires.
Le rôle du parti révolutionnaire n’est pas de s’accommoder à la conscience moyenne des ouvriers et de renforcer leurs fausses conceptions. Il doit aller à la racine, s’appuyer sur leur haine de classe saine, et les aider à racler leurs préjugés faux. Il doit transformer les aspirations inconscientes de la classe ouvrière en une véritable conscience révolutionnaire.
La tentative de conquérir le « grand public » est la recherche d’un raccourci qui n’existe pas. Il s’agit d’opportunisme : l’adaptation au système existant et à ses préjugés réactionnaires. Se limiter à présenter aux ouvriers ce que la plupart d’entre eux savent déjà de toute façon n’aide en rien à la lutte de libération.
La défense sans compromis, sans dilution du programme exige le rassemblement de la couche plus avancée, plus consciente et plus active de la classe ouvrière. Le programme révolutionnaire exige une organisation ferme de révolutionnaires, et non un réseau lâche de sympathisants passifs. C’est la seule façon de construire les forces révolutionnaires :
« Si nous commençons par une organisation solidement établie de révolutionnaires, nous assurerons la résistance du mouvement dans son ensemble… Mais si nous commençons par l’organisation ouvrière la plus large, soi-disant la plus “accessible” à la masse, nous ne réaliserons ni l’un [les réformes] ni l’autre de ces buts [la révolution] ». Que faire?, chapitre 4
Le parti « d’avant-garde »
Le parti révolutionnaire est le parti de la minorité consciente de la classe. Un tel « parti d’avant-garde » semble élitiste, même autoritaire au moraliste petit-bourgeois. Mais il se base sur un constat simple qui découle du développement réel de la lutte de classe et de la conscience ouvrière : la classe n’est pas homogène. Toutes les couches ne luttent pas en même temps, ne tirent pas les mêmes conclusions révolutionnaires en même temps.
Celui qui tire certaines conclusions – par exemple, que les capitalistes et les ouvriers ont des intérêts opposés et irréconciliables, ou que l’État dit démocratique est en fait la dictature des banques et grandes entreprises – a un développement de conscience plus avancé que la moyenne de nos jours.
Ce n’est pas là un jugement moral, mais un fait. Ce constat implique toutefois un devoir d’aider les différentes couches de la classe ouvrière à surmonter leurs préjugés bourgeois qui les paralysent et à obtenir une perspective claire sur leur propre rôle dans l’histoire.
Aujourd’hui, toutes les classes sociales sont en effervescence. De larges couches ouvrières perdent confiance dans les partis établis, les institutions et, de plus en plus, dans tout le système économique capitaliste. Et pourtant, elles n’approuvent pas encore le programme communiste, selon lequel la crise ne peut être résolue que par le renversement des capitalistes par une révolution et la construction d’une économie planifiée socialiste, et ne s’engagent donc pas activement en faveur de ce programme.
Devons-nous alors abandonner le programme du communisme? Absolument pas! Cette effervescence générale produit une couche particulière, plus avancée.
Des milliers, voire des dizaines de milliers de gens, sont prêts à lutter aujourd’hui pour rien de moins que l’entièreté du programme communiste. Cette couche doit être rassemblée maintenant sur la base d’un programme entièrement révolutionnaire. Le Parti communiste révolutionnaire vise à unir cette couche sous la bannière fière du communisme.
Mais cette couche n’est que l’avant-goût de ce qui s’en vient. Une compréhension claire de la crise capitaliste actuelle nous permet de prédire avec une certitude scientifique que la dure réalité du capitalisme rendra de plus en plus de couches réceptives aux idées communistes. Mais la voix communiste sera-t-elle assez forte pour porter ce programme à toutes ces oreilles attentives? Cela dépend entièrement de l’organisation de la couche plus avancée aujourd’hui!
Les cadres : l’échafaudage du parti de masse
La construction de ce parti ne peut pas être laissée au hasard. Le programme révolutionnaire a besoin d’un corps. Il faut des personnes capables d’appliquer ce programme à toutes les questions concrètes, de le défendre contre la pression de « l’opinion publique » et de le porter dans toutes les luttes et tous les mouvements.
Cela ne va pas de soi. Les communistes resteront minoritaires jusqu’à la révolution. C’est dans la nature des choses : il y a contre nous tout le pouvoir de l’État capitaliste, de ses médias, de la religion, de son système éducatif. La pression de se conformer aux préjugés et aux modes de vie bourgeois est gigantesque. Tous ceux qui se sont solidarisés avec le peuple palestinien opprimé ces derniers mois l’ont expérimenté dans leur propre chair. Tous les autres partis de « gauche » ont tout simplement plié face à cette pression.
Les révolutionnaires fermes ne naissent pas tels quels. Cela doit être appris par l’expérience dans la pratique, mais aussi par la formation à la théorie révolutionnaire la plus puissante : le marxisme. Le marxisme donne une compréhension profonde du monde dans lequel nous vivons. C’est un guide pour l’action révolutionnaire. Si nous voulons gagner sur le champ de bataille de la guerre de classe contre les capitalistes les plus organisés, les révolutionnaires ont besoin d’un point de vue complètement indépendant de la classe dirigeante.
C’est pourquoi Lénine affirmait avec fermeté que la voie vers un parti communiste de masse passe uniquement par des révolutionnaires bien formés et expérimentés, qui ont appris le marxisme en théorie et en pratique. De tels « cadres » constituent l’échafaudage nécessaire, le fondement solide comme le roc, pour la construction d’un parti communiste de masse.
La construction de cet échafaudage doit se faire bien avant la révolution, « car au moment de l’explosion, de la conflagration, il est trop tard ». La meilleure preuve de la profondeur de la compréhension de Lénine, de sa clairvoyance et de sa cohérence inédite, est qu’il a exprimé haut et fort cette idée dès 1901 et qu’il a investi toute sa vie dans sa mise en œuvre.
Si la Révolution russe a triomphé en 1917, alors que toutes les nombreuses autres grandes révolutions prolétariennes en Allemagne, en Espagne, en Italie et ailleurs se sont soldées par des défaites tragiques et une réaction sanglante, la différence se trouve précisément là. Lénine et les bolchéviks étaient prêts en 1917. Tous les autres ne l’étaient pas.
Cette leçon est fermement ancrée dans notre ADN et sera déterminante pour le travail du PCR dans la prochaine période : les premiers 1000 ou 2000 communistes au Canada doivent être organisés et aguerris par la pratique et la théorie marxiste. C’est seulement avec un tel échafaudage stable que nous serons en mesure de gagner les prochaines couches au programme communiste lorsqu’elles entreront en lutte.
Le journal révolutionnaire
Dans cette tâche de construction du parti, Lénine a toujours attribué au journal révolutionnaire un rôle absolument décisif. En 1901, il déclarait :
« À notre avis, le point de départ de notre activité, le premier pas concret vers la création de l’organisation souhaitée, le fil conducteur enfin qui nous permettrait de faire progresser sans cesse cette organisation en profondeur et en largeur, doit être la fondation d’un journal politique pour toute la Russie. » – Par où commencer?
Un journal centralisé (et non des journaux locaux dispersés) pour l’entièreté du mouvement ouvrier russe – l’Iskra – était nécessaire pour surmonter la fragmentation idéologique, programmatique et organisationnelle.
Un vrai journal révolutionnaire crée une compréhension commune. Il est le visage public du parti. Il permet de porter les idées et le programme révolutionnaires dans toutes les entreprises, tous les quartiers, toutes les salles de classe et toutes les luttes de classe.
« Le journal ne borne pas cependant son rôle à la diffusion des idées, à l’éducation politique et au recrutement d’alliés politiques. Il n’est pas seulement un propagandiste collectif et un agitateur collectif ; il est aussi un organisateur collectif. » – Par où commencer?
Dans Que faire ?, Lénine illustre ce rôle d’« organisateur collectif » du journal par une métaphore puissante. Le journal est le « fil » à partir duquel nous construisons l’organisation :
« Lorsque les maçons posent en différents points les pierres d’un immense édifice, aux formes absolument inédites, ils tendent un fil qui les aide à trouver la place juste, leur indique le but final de tout le travail, leur permet de mettre en oeuvre non seulement chaque pierre, mais même chaque morceau de pierre qui, cimenté avec le morceau qui précède et celui qui suit, donnera la ligne définitive et totale. » Que faire?, chapitre 5b
Et à son époque, constate Lénine, ce ne sont ni les pierres ni les maçons qui manquent : « Seul un fil visible par tous fait défaut ». Cela conduit à ce que les pierres soient « posées tout à fait inutilement ».
De chaque page au travail
Cela s’applique sans aucun doute à notre situation actuelle. Mais ce n’est pas seulement que nos maçons du communisme posent leurs pierres de manière désordonnée et inutile, parce qu’il leur manque une ligne directrice commune. Plus encore : la plupart des maçons sont aujourd’hui au chômage et attendent d’être mis au travail.
Aujourd’hui, il y a des milliers de jeunes révolutionnaires au Canada. Ils se considèrent déjà aujourd’hui comme communistes ou se dirigent dans cette voie. Ils sentent tous qu’il faut construire un édifice gigantesque d’une ampleur sans précédent : un parti communiste de masse qui n’accomplira rien de moins que de mener la classe ouvrière à la révolution mondiale, au renversement de toute la domination de classe et à la libération de l’humanité. Mais ils sont tous encore isolés et atomisés. Alors, chacun pense de son côté : « Il faut que je fasse quelque chose! Mais quoi? Par où commencer? Je suis seul ».
Ce dont nous avons besoin aujourd’hui, c’est précisément de cette ligne directrice qui nous montre le chemin et le but final de notre travail commun. Le journal révolutionnaire Révolution communiste se donne cet objectif. Il fait de nous tous les parties d’un ensemble plus grand, d’une construction gigantesque. Il donne à chacun d’entre nous la possibilité d’apporter sa pierre et de la placer judicieusement au bon endroit.
Chaque individu peut mieux faire si tous ont une compréhension et un plan communs. Contrairement à ce que pensent les anarchistes, la plus grande centralisation possible est en réalité la condition préalable à l’initiative « décentralisée » la plus énergique. C’est pourquoi tous les membres du parti et les ouvriers sympathisants doivent envoyer à la rédaction leurs expériences et les rapports de leur activité dans tous les coins et dans toutes les luttes. Ceux-ci doivent être rassemblés, évalués et généralisés.
De cette manière, Révolution communiste pourra montrer par mille exemples que nous ne sommes pas seuls. Ce journal doit devenir le porte-parole des communistes et de tous les travailleurs conscients du pays. Il publiera les meilleurs rapports sur le travail quotidien. Il appliquera le programme communiste à toutes les questions les plus diverses et donnera ainsi aux communistes les armes pour leur travail quotidien. Il montrera notre entreprise commune et rassemblera les résultats de nos activités les plus diverses. Ainsi, il nous motivera à nous atteler sans relâche, de tous côtés, au travail qui mène à la révolution.
Construire avec le journal
À l’époque de la Russie tsariste, le travail politique révolutionnaire était interdit. Les cercles étaient régulièrement détruits par la répression policière.
Mais Lénine assurait que le journal indiquerait toujours immédiatement aux cercles locaux le plan commun et l’ampleur du travail. Avec un journal centralisé, où les fils de tout le travail sont réunis, le travail n’était pas toujours à reprendre de zéro lorsqu’un cercle était démantelé : « Deux ou trois personnes énergiques suffisent pour construire de nouveaux cercles de jeunes en quelques semaines ».
Aujourd’hui, la répression policière ne menace pas de détruire régulièrement nos cellules. Mais l’idée sous-jacente est mille fois vraie. Révolution communiste doit te permettre, à toi et à tous, de créer de nouveaux groupes dans de nouveaux lieux, entreprises, écoles, avec deux ou trois personnes énergiques. Tout ce dont tu as besoin, c’est du journal révolutionnaire. C’est le parti dans ton sac à dos.
Si tu bâtis l’organisation constamment avec lui, si tu fais de l’agitation en défendant les positions qui y sont exposées, si tu organises des discussions autour de son contenu, si tu t’inspires des rapports, si tu envoies tes propres contributions, nous te garantissons que tu deviendras un cadre révolutionnaire, capable de construire des cellules partout, qui apprendra à évaluer de manière autonome les nouvelles situations et à intervenir dans celles-ci.
Du journal ouvrier au parti de masse
Tout cela n’est pas resté dans les déclarations d’intention de Lénine et dans les pages de Que faire? : les journaux bolcheviques, l’Iskra et les organes qui lui ont succédé, ont effectivement joué dans l’histoire du bolchévisme ce rôle central et dirigeant pour la construction du parti.
À toutes les étapes, l’organisation révolutionnaire se développe avec le journal, par le journal, sur la base du journal. À chaque étape du développement de l’organisation, le journal a été publié avec une fréquence plus élevée et diffusé plus largement.
Les bolchéviks ont réussi à créer avec leurs journaux un réseau de cellules unies par une compréhension commune et capables elles-mêmes de faire le travail révolutionnaire sur le terrain. Au plus fort de la phase prérévolutionnaire 1912-14, la Pravda vendait entre 40 000 et 60 000 exemplaires… par jour! Environ la moitié dans les rues, l’autre à l’intérieur des usines.
Elle était lue collectivement et discutée partout. Cela témoigne de l’ancrage, de la fusion des bolchéviks avec l’avant-garde de la classe ouvrière. La Pravda était « l’organisateur collectif » du parti. Par le biais du journal, ils avaient établi des liens et un réseau de correspondants dans toutes les usines.
La débâcle de la Première Guerre mondiale a fait reculer les bolchéviks. Mais les ouvriers bolchéviques avaient été à l’école de l’Iskra et de la Pravda pendant des années, ils avaient été formés aux idées et aux méthodes de Lénine et étaient donc capables de penser de manière indépendante. Cela n’a jamais pu être détruit.
Ces bolchéviks, qui n’étaient que 8000 au début de 1917 et qui avaient une conscience de classe, constituaient l’échafaudage nécessaire pour gagner peu à peu, par des explications patientes, l’avant-garde de la classe ouvrière d’abord, puis l’écrasante majorité de la classe ouvrière et enfin les paysans au programme révolutionnaire pendant l’année de la révolution.
C’est la tradition du bolchévisme que nous défendons. Si les combattants du Parti communiste révolutionnaire absorbent et assimilent ces leçons, s’ils apprennent à les appliquer de manière autonome, chaque jour et partout, et à les mettre énergiquement en pratique, nous pourrons poser ensemble les premières pierres pour construire, avec la classe ouvrière mondiale, le plus gigantesque et le plus beau bâtiment de l’histoire de l’humanité.